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 Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT

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MessageSujet: Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT   Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT EmptyDim 10 Avr - 17:12

Iseult Jenkins, une enfant différente des autres. Une enfant déjà trop grande. Sa vie n’était constituée que de jours ennuyeux et mornes. Elle n’avait tout simplement aucun intérêt. Cela n’avait pas toujours été le cas, bien sûr. Avant, elle avait eu Andréa. Andréa qui avait éclairé ses jours d’une lumière étincelante et enivrante. Cette lumière que même le jour ne pouvait lui offrir. Et lui, ce tout petit brin de bonheur, il avait réussi à l’illuminer. De sa beauté hypnotisante, de son rire cristallin et de sa joie de vivre. Finalement, ils n’avaient jamais rien eu en commun, si ce n’est cet amour qu’ils avaient partagé et qu’ils avaient regardé grandir avec le temps. Elle était souvent triste, beaucoup ailleurs et toujours malheureuse. Sur ses traits fins et blancs, on pouvait lire la douleur qui lui étreignait le cœur. Parce qu’il était question de cela. Son cœur. Son cœur trop fragile pour vivre. Son cœur trop pur pour la vie. Alors, il avait fini par se lasser. On ne tombe pas amoureux de la tristesse et du chagrin. On ne peut pas, sinon, ça vous détruit. Il avait eu raison de partir, mais elle, alors ? Elle aussi s’était brisée. Comme un miroir éclaté. Et désormais seule, elle devait continuer d’avancer. Mais grâce à lui, sans doute un peu, elle arrivait à se montrer plus satisfaite de la vie. Elle parvenait parfois à oublier son cœur trop fragile et ses sentiments déraisonnables. Elle avait un peu grandi. Mais pas suffisamment. Pas suffisamment pour ne pas ressentir ce besoin irrépressible d’être le centre de toutes les attentions. Pas parce qu’elle était jolie. Pas parce qu’elle en valait la peine. Non, seulement parce qu’elle était malade et qu’un jour où l’autre – comme tout le monde, dans le fond – elle devrait partir. Partir loin et elle devrait tout abandonner. Ceux qu’elle avait aimé et qu’elle aimerait jusqu’à la mort et bien au-delà. Et Tadeck Nosborn était l’une des personnes qui réveillait ce sentiment en elle. Celui d’être importante, d’avoir un peu de valeur. Pour une raison absurde et méconnue de tous, même d’eux sans doute, elle avait besoin de le voir. De l’effleurer parfois et de savoir qu’elle n’était pas rien pour lui. Elle ne voulait pas une place immense dans son cœur, ni dans son esprit… Elle voulait juste… Quelque chose dont elle ignorait tout, planqué dans un coin de sa tête. Lorsqu’elle se levait le matin, elle pensait souvent à lui. Elle les imaginait rire, se donnant la main et être heureux simplement. Parfois en toute amitié, parfois un peu plus que cela. Mais quand elle battait des cils et que la réalité refaisait face, elle savait que rien de tout cela n’arriverait jamais. Parce qu’il n’était pas comme ça. Il n’avait rien d’Andréa. Et c’était justement pour cela qu’elle avait besoin de sa présence. Parce que grâce à lui, elle pouvait être l’être vivant et lui le malade. Malade de quoi, elle ne le savait pas. Elle ne l’avait pas encore compris. Mais un jour, elle finirait par briser ses barrières et ce jour là… Ce jour là sera la plus beau de toute sa vie, elle en était persuadée.

Et pourtant, il continuait de l’ignorer superbement. Comme s’il n’avait pas senti sa présence dans son dos. Comme si elle n’était qu’un être de papier que le vent finirait par emporter. Comme si elle n’était rien. Elle était blessée. Quelque part entre son cœur et sa tête, un organe saignait, avec abondance. Mais le problème, c’est qu’il n’y avait aucun remède. Alors, elle chassait ses maux à sa façon. Comme une enfant. Elle lançait un jeu dans l’espoir vain qu’il y réponde. Qu’il comprenne ce qu’elle ressentait. Qu’il s’ouvre un peu. Elle ne s’attendait pas à des miracles, c’était Tadeck après tout, mais pas à pas… peut-être qu’ils y arriveraient. Mais bien sûr, aucune réponse ne venait. Elle n’y avait pas crû, seulement espéré. Son sourire s’estompa quelque peu. Déçue par le manque d’effort qu’il faisait. Elle voulait simplement un bonjour. Était-ce la lune ? Jamais elle ne lui demanderait d’aller au-delà de lui, ce n’était pas dans son intention. Mais si un simple bonjour leur faisait barrière, comment pourraient-ils s’attendre à davantage ? Elle ne baissa pas les bras pour autant, c’était Iseult. Et avec ses attitudes enfantines, elle lui prit la main pour le forcer à se retourner. Ce n’était peut-être pas l’idée du siècle, mais ça lui avait fait du bien… A elle. Cette chaleur caressant sa peau blanche. Elle aurait aimé qu’il y referme ses doigts, mais ça, elle était consciente que c’était impossible. Elle se contenta de lui sourire en remarquant l’effort qu’il faisait de tout même lui faire face. Le regard froid qu’il posait sur elle la laissait complètement interdite, un peu pétrifié. Elle essaya d’engager la conversation, rien n’y fit. Ce silence imperturbable qui s’allongeait inévitablement. Nerveuse, elle se mordillait alors la lèvre inférieure et relâchait doucement cette main tant chérie. À peine l’avait-elle relâché qu’il s’écartait d’elle. Il reculait aussi loin que cela était permis. À nouveau son sourire s’estompa et seules ses grimaces enfantines étaient lisibles sur son visage.

Et puis, à nouveau, il posa son regard sur elle. Ce regard si froid et placide. Elle l’aimait ce regard. Certes, ce n’était pas un regard qui disait : « je tiens à toi. » ; que du contraire, mais c’était son préféré. Celui qu’elle apercevait lorsqu’elle fermait les yeux. Le regard de Tadeck. Ses yeux bruns aux sourcils broussailleux. Une splendeur pour les yeux, un ravissement pour le cœur. Et il finit tout de même par lui adresser la parole. Sa voix pourtant calme et sans expression la fit chavirer. Qu’il était bon de l’entendre. Même si les mots n’étaient pas ceux qu’elle attendait. « Ne touche pas mes mains. Elles sont sales. » Iseult finit par lui sourire tristement. Elles étaient sales ? Et alors, qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire ? Ce n’était pas une miniature, ni une petite nature. Elle pouvait encaisser ce genre de chose sans faire de crise cardiaque, pas de quoi en faire un flan ! Elle ouvrit la bouche pour lui faire remarquer, mais elle la referma aussitôt. Ça n’en valait pas la peine, il n’y répondrait pas. Alors, pour l’une des rares fois de son existence, Iseult Jenkins garda le silence mais ne partit pas pour autant, pas maintenant. Elle attendrait qu’il dise autre chose, n’importe quoi. Et au bout d’un moment, il finit par le faire. « Je dois m'occuper de nettoyer la terrasse après. Tu devrais retourner déjeuner. » Et à nouveau ce sourire triste qui apparaît. Il n’avait pas compris. Il ne comprendrait sans doute jamais. Elle n’avait pas faim. Pas de cela en tout cas. Elle, elle avait faim de sa voix, faim de ses mains, faim de ce qu’il était et de ce qu’ils pourraient être en plus. Elle ne s’en était pas rendu compte jusqu’ici… Mais elle l’aimait bien plus qu’elle n’avait pu l’imaginer. Alors, sans un mot, elle le regarda se mettre à genoux et l’observa manier ses cisailles. Mais concentré par sa tâche, il fit comme s’il ne la voyait pas. Jusqu’à ce qu’elle entende sa voix s’élever. « Tu devrais t'éloigner, un accident est si vite arrivé avec ces engins. Je ne voudrais pas que... » Les yeux d’Iseult brillèrent un instant, peut-être que c’était possible finalement. Peut-être qu’elle comptait. Même un tout petit peu. Cela lui aurait suffit pour être comblé. Mais bien sûr, il fallut qu’il ajoute cette dernière phrase : « Non rien. Je dois travailler maintenant. » N’était-ce pas une belle façon de la rembarrer ? De lui dire de s’en aller ? Un peu vexée, la jeune fille se pinça les lèvres. Ce n’était pas le genre de demoiselle que l’on snobe comme bon nous semble. Iseult avait du caractère et dans celui-ci, son amour propre était plus que surdimensionné. Elle était susceptible. Elle ne pouvait pas tolérer qu’on lui parle comme ça. Et pourtant, c’était Tadeck, alors… Elle était prête à pardonner.

Iseult ne rejoignit pas la terrasse comme il le lui avait recommandé, elle ne s’éloignait pas comme il le lui avait conseillé. Bien au contraire. Elle restait là, tout prêt. Elle se mit à croupi, à ses côtés. Déposant ses coudes sur ses genoux, et sa tête dans ses paumes ouvertes. Et elle le regarda faire. Pendant quelques minutes. Elle voulait parler, dire quelque chose, se faire remarquer… Mais hypnotiser par les gestes du jeune homme, elle ne savait plus que dire, que faire. Mais Iseult était Iseult et bientôt, elle revient à elle. Déposant doucement sa main sur l’épaule du jeune homme, même si elle était consciente d’aller trop loin, sa voix se fit murmure. « Tu es fâché ? » Sa voix tressaillait alors que les mots se défilaient lentement de sa bouche. La question était absurde, mais tout au fond de son être, Iseult était persuadé que Tadeck était fâché après elle. « Tu es fâché. » Cette fois, ce n’était plus une question, c’était un constat. Il était fâché qu’elle soit aussi… tactile, aussi… elle. Au fond, la clé du problème était là. Elle était Iseult et il était Tadeck. Tant que cela resterait ainsi, ils ne pourraient peut-être jamais avancé. Récupérant sa main, elle finit par se redressée et lui tourner le dos pour – comme il lui avait dit – retourner déjeuner. Mais s’arrêtant à mi-chemin, n’était éloigné de lui que de quelques mètres elle se risqua à un speech digne de sa personne. « Je voulais pas t’énerver, tu sais ? Je voulais juste que tu me dises bonjour. » Sa voix s’était brisée sur ce dernier mot. Si seulement elle lui avait demandé la lune, alors elle aurait compris. Mais non, elle réclamait un peu de politesse rien de plus. « Tu sais comment ça s’appelle : dire bonjour ? De la politesse. Je te demande pas de m’aimer ou de faire comme si on était les meilleurs amis du monde, je m’en rends bien compte que c’est trop te demander… Tu pourrais pas être juste… poli ? Je sais pas moi, t’as pas envie juste une fois de te montrer agréable ? Même si ça ne te ressemble pas, même si ça ne dure qu’une fraction de seconde… Ca te ferait du bien. Déride-toi, souris bon sang ! Le monde n’est pas si mal. Regarde, il tourne autour du soleil et tiens tous debout ! Et puis, y a du soleil, les oiseaux chante et… » Plus les mots sortaient de sa bouche, plus ses yeux se mettaient à briller. Ce plaidoyer n’était pas seulement destiné à Tadeck, il la concernait aussi. Elle laissait échapper un petit rire nerveux, incontrôlé qui lui faisait tellement honte. « Je voulais juste un bonjour… » Elle se répétait, inlassable, mais elle était tellement blessé au fond d’elle. Tant et si bien, qu’elle se dirigea vers la terrasse. Elle se mit à débarrasser la table en silence. Faisant des allées et venues entre la maison et le jardin. Quand elle eut fini, sa voix – nettement plus froide et distante cette fois – s’éleva. « Tu en as pour longtemps ? J’avais dit à mes parents que je restais ici, mais tout compte fait, je suis pas sûre d’en avoir envie. Je vais aller voir Disturbia. Le temps est beau. C’est idéal pour une promenade. Soit. J’aimerais savoir pour combien de temps tu en as ? Histoire que je revienne avant que tu ne partes. Ou que j’attends que tu ais fini pour partir… Soit. Je ne voudrais pas laisser la maison sans surveillance… » Elle essayait bien sûr de réveiller quelque chose en lui. Mais ça n’arrivera pas, sans doute. Elle n’y comptait pas trop.
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MessageSujet: Re: Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT   Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT EmptyDim 10 Avr - 22:25

Le passé fait des gens ce qu'ils deviennent. Il donne une explication à leurs comportements, à leurs doutes et à leurs espoirs. Il explique tout, absolument tout. Parfois, il permet aux autres de mieux ce cerner les uns les autres et de se pardonner. En fait, il permet de comprendre, il permet le pardon, la compassion, la crainte, l'admiration, l'amitié et finalement, l'amour. On dit souvent : le passé, c'est le passé ! En pensant naïvement que c'est terminé. Faux. Complètement faux, archi-faux ! Le passé vit toujours à travers nous. Il est ce qui nous constitue, il est nous. Le passé, c'est nous dans le présent. Et c'était justement l'horrible enfance et adolescence de Tadeck qui avait fait qu'il était devenu ça aujourd'hui. Cet adulte déséquilibré et perdu, redoutant les contacts et la parole. Cet adulte qui n'avait jamais eu d'enfance, qui n'avait jamais connu le répit et la douceur d'un foyer. Cet adulte qu'on avait malmené, retournant toute son innocence et sa gentillesse contre lui pour le faire passer pour un monstre. Et bêtement, Tadeck y croyait. Il pensait sincèrement qu'il était un monstre horrible et pervers, il pensait vraiment qu'il ferait du mal à quiconque l'approchait. Et il croyait vraiment qu'il était égoïste lorsqu'il osait enfin abaisser ses barrières pour nouer une relation avec quelqu'un, puisque du coup, il pensait à lui, à son besoin d'échanges avant de penser au mal qu'il allait faire par la suite. Et le pire, c'était que d'une façon qu'il ne soupçonnait pas, il finissait réellement par blesser les gens. Non pas parce qu'il les agressait ou quoi que ce soit dans le genre, non, pas du tout. Tadeck n'avait jamais levé la main sur qui que ce soit, ni eut de gestes déplacés. Non, il leur faisait mal parce qu'il les avait laissé s'attacher à eux avant de les repousser à chaque fois, réalisant trop tard qu'il avait fait une erreur. Et le garçon n'arrivait pas à comprendre qu'il faisait les mauvais choix à chaque fois. Il ne comprenait pas, parce qu'il ne savait pas que l'on pouvait s'attacher à lui, pour de vrai. Sa mère lui avait toujours dit que personne ne l'aimerait, qu'il était sale, ignoble et qu'il répugnerait chaque personne qui lui parlerait. Que si des filles s'intéressaient à lui, ce serait forcément par pitié, voir par dépit. Elle lui disait qu'il ne méritait pas de vivre et qu'il était une punition pour chacun d'entre eux. Et le pauvre petit garçon, il y avait cru. Et aujourd'hui encore. C'était pourquoi plus il s'attachait à quelqu'un, plus il fuyait. Parce qu'il ne voulait pas faire de mal, parce qu'il ne voulait pas qu'on est pitié de lui, parce qu'il "savait" que la personne en face ne partageait pas ce qu'il ressentait. Et croyez-le, il était extrêmement difficile de grandir en pensant ça. Et il était même impossible de se construire convenablement. Disons que Tadeck marchait lentement au bord d'un précipice, et que parfois il tanguait d'un côté ou de l'autre. Qu'il avait le choix entre tomber dans le ravin, ou autrement dit couper tout contact avec ses semblables, s'isoler complètement et partir vivre en ermite -ne riez pas, il y pensait réellement. Et entre regagner la terre bien ferme, s'éloigner loin de ce gouffre douloureux et devenir quelqu'un. Se mettre à parler, à exprimer ses émotions, à être "normal" en quelque sorte. Dans la norme actuelle dirons-nous. Mais Tadeck ne parvenait pas à se décider. Alors, il restait sur le rebord et avançait doucement dans la même lignée. Il n'était ni coupé du monde, ni intégré. Il était entre les deux. Il souffrait. Et il faisait souffrir les autres aussi.

Iseult parlait. Elle parlait tout le temps. Pourquoi ? Tadeck ne voyait pas l'utilité de parler autant. La nature nous avait fait don de la parole certes, mais pourquoi en abuser ? Tadeck n'avait jamais été de ce qui profitait de ce qu'il avait jusqu'à l'épuisement. Il parlait oui. Seulement quand il avait quelque chose d'utile à dire. La futilité, ce n'était pas son truc. Et il trouvait que grand nombre de personnes parlaient trop, tout le temps et surtout : pour rien. Pour dire bonjour, pour dire qu'il fait beau, pour dire que machin lui a grillé la priorité. Oui, et puis ? Tout le monde s'en fou. Surtout lui. Et pourtant, aussi paradoxale que cela puisse paraitre, le jeune homme adorait l'entendre parler. Oui vraiment, il adorait. Il était comme... subjugué. Elle pouvait bien lui dire la plus inutile de toutes les choses sur cette terre, qu'il trouverait ça passionnant. Mais le gros problème dans tout ça en vérité, c'était que elle, elle attendait une réponse ensuite. Alors que Tadeck n'était pas capable de lui en offrir une. Et c'était là que tout se compliquait. Les gens acceptaient plus ou moins le fait qu'il ne prenne pas la parole. Mais ils n'encaissaient pas qu'il ne réponde pas. Ah ça non, ils avaient horreur de ça. Et alors on le prenait pour quelqu'un de mal élevé, de pédant, de prétentieux, de snob et j'en passe. Pourtant, Tadeck était quelqu'un d'extrêmement simple. Il ne se croyait pas meilleur que les autres, pas plus intéressant non plus. Peut-être juste plus... sage ? Raisonnable ? Oui, quelque chose dans ce genre-là. Mais il pardonnait à Iseult d'être insolente, de parler trop, de le toucher même. Pourquoi lui pardonnait-il ? Il ne savait pas. Ou peut-être qu'au contraire, il en savait trop et qu'il préférait se voiler la face. Fermer les yeux sur toute l'étendue de ses sentiments et feindre d'être totalement indifférent à elle. Mensonges, balivernes et fabulations ! On ne se fiche pas d'une personne quand on pense à elle souvent dans une journée. Quand son simple souvenir vous apaise. Quand le son de sa voix vous transporte. Et quand on a besoin de la voir. Car oui, aussi irréel que cela puisse paraître, c'était bien le cas : Tadeck Jaad Nosborn avait besoin de voir Iseult Jenkins. Oh non, évidemment, il n'en avait pas conscience. Il ne s'était jamais levé un matin en se disant : il faut que je vois Isy. Non, non et non. Ça n'était jamais arrivé et ça, ça n'était pas prêt de changer. Mais voilà, la vérité était là, juste sous les yeux. Mais Tadeck les fermaient et Iseult elle, avait peur de les ouvrir toute seule. Alors, ils restaient ignorants, chacun de leur côté. Idiots, naïfs, contraires. Si lointains et si proches à la fois. Si douce et si dur. Si joviale et si éteint. Si courageuse et si lâche. Si Iseult et si Tadeck.

Et pour une fois, Iseult prit sur elle. Conservant un silence religieux durant un long moment -pour elle- alors qu'il la repoussait, comme à chaque fois. Son sourire triste et son regard déçu ne lui échappèrent pas. Mais comme toujours, il feintait de ne rien avoir remarqué. Parce que c'était plus facile pour lui de nier l'évidence, de ne pas voir que son comportement l'atteignait. Mais, inlassable, elle restait là, plantée devant lui, patiente et pleine d'espoir. Des espoirs vains ? Oui, non, peut-être. Qui sait ? Elle restait là, n'attendant certainement qu'un signe de Tadeck qui ne venait pas. Et qui ne semblait pas vouloir venir un jour. Finalement, c'était comme si Tadeck courrait vers le ravin et qu'Iseult le suivait de près. De si près qu'elle n'aurait pas le temps de s'arrêter en réalisant qu'il y avait un gouffre sans fin au bout de leur course. Et Tadeck, cruel, l'entrainerait dans sa chute longue et houleuse. L'entrainant dans les méandres de son âme abimée, dans la véracité de son passé et de toute l'emprise qu'il avait sur lui. Et si Tadeck y survivait encore, Iseult elle, combien de temps pourra-t-elle tenir ? C'était pourquoi le jeune continuait de la repousser. Mais à chaque fois, il revenait malgré tout. De façon masquée, détournée. Mais il revenait quand elle mettait trop de temps à le rejoindre elle-même. C'était comme si d'une certaine façon, il l'obligeait à continuer à espérer quelque chose. Quoi précisément, il n'en savait rien, personne ne savait. Mais il y avait bien quelque chose malgré tout. Et de nouveau Tadeck se haïssait. Parce qu'il était égoïste et qu'il se donnait envie de vomir. Se détournant violemment d'elle pour se remettre à son travail, il essaya tant bien que mal de retirer de son esprit son visage tordu par la déception et la peine qu'il lui infligeait. Tant et si bien, qu'il manqua de se couper en taillant une rose. Mais voilà, Iseult n'était pas partie. Bien au contraire. Elle était tout d'abord resté plantée là, le surplombant de toute sa candeur infernale pour finalement s'accroupir et se mettre à son niveau. Posant ses coudes sur ses genoux et son menton dans ses paumes de mains, elle se mit alors à le fixer. Calme, silencieuse. Comme si elle n'avait pas entendu, ou pas écouté ce qu'il venait de lui dire. Il faillit s'interrompre, planter son regard dans le sien et la provoquer. L'obliger à partir juste par la force de ses prunelles. Et dieu sait qu'il en avait de la force dans le regard. C'était normal après tout, c'était son outil de communication à lui. Et Iseult l'avait parfaitement comprit avec le temps. Mais il n'en fit rien. Sa présence ne le dérangeait que très peu si elle ne disait rien. Ils restèrent ainsi un certain temps, lui travaillant avec attention et elle, l'observant paisiblement. Malheureusement, cet instant de répit fut finalement écourté par la belle enfant.

« Tu es fâché ? » Demanda-t-elle tout en déposant sa main sur son épaule. Tadeck se raidit aussitôt, cessant tout mouvement. Son visage s'obscurcit alors qu'il n'écoutait déjà plus ce qu'elle disait. Ce contact l'électrisait et le rendait fou. Mais pas dans le bon sens, non. Fou de rage, de dégoût. Pas contre elle, évidemment. Contre lui. Elle le touchait, mais voyez-vous, c'était comme si c'était lui qui l'avait touché alors qu'elle n'avait pas voulu. « Tu es fâché. » Répéta-t-elle de façon bien plus affirmative. Crispé, nerveux Tadeck resta totalement silencieux. Il finit par tourner très lentement sa tête vers son épaule pour fixer la main fragile de la jeune femme. Dans un soufflé irrégulier et tremblant, il attrapa délicatement sa main, du bout des doigts comme si elle était malade. Et là, il la repoussa. Doucement, mais fermement, laissant bien entendre qu'elle ne devait plus jamais refaire ça. Le problème, c'est que ce n'était pas la première fois que Tadeck lui faisait comprendre qu'il ne voulait pas de contact. Mais soit Iseult ne comprenait pas, soit elle oubliait, soit elle s'en foutait. Et peut-être même que c'était un peu des trois. Finalement, face au manque de réactions du garçon, la belle Iseult se leva et commença à s'éloigner. Troublé, stressé et perdu, Tadeck se remit à fixer les fleurs, tremblant presque. Il profitait qu'il lui tourne le dos pour laisser quelques émotions transparaitre sur son visage d'ordinaire si neutre. Il déglutit, alors qu'il sentait que son cœur était à la limite d'exploser dans sa poitrine. Il était confus et ses idées s'embrouillaient. Et tandis qu'il tentait de reprendre son souffle, là, les jambes pliées et le dos courbé au-dessus de la terre, la voix de son "amie" s'éleva à nouveau : « Je voulais pas t’énerver, tu sais ? Je voulais juste que tu me dises bonjour. » Oui, il savait. Mais ça ne changeait rien. Lui, il n'avait pas voulu lui dire bonjour ce matin là. Il n'avait pas voulu, parce qu'elle était trop belle sous ce soleil matinal et que ça lui faisait peur. Et il n'était ni fâché, ni énervé. Ou en tout cas, pas contre elle. Il n'avait jamais rien à lui reprocher. Parce qu'elle était naturelle et que c'était tout ce qui comptait à ses yeux. Il ne lui en voulait pas d'être ainsi, car il savait que lui-même n'était pas parfait. Et que personne ne l'était d'ailleurs. Tadeck ne jugeait jamais les gens. Il les acceptait toujours tels qu'ils se montraient, tels qu'ils étaient. Alors oui, il savait. Mais ça n'avait pas la moindre importance. Ne réagissant toujours pas, Tadeck était totalement immobile. Elle allait encore parler, il le savait. Il la connaissait trop bien. Et de toute façon, lui, il n'avait rien à dire. « Tu sais comment ça s’appelle : dire bonjour ? De la politesse. Je te demande pas de m’aimer ou de faire comme si on était les meilleurs amis du monde, je m’en rends bien compte que c’est trop te demander… Tu pourrais pas être juste… poli ? Je sais pas moi, t’as pas envie juste une fois de te montrer agréable ? Même si ça ne te ressemble pas, même si ça ne dure qu’une fraction de seconde… Ça te ferait du bien. Déride-toi, souris bon sang ! Le monde n’est pas si mal. Regarde, il tourne autour du soleil et tiens tous debout ! Et puis, y a du soleil, les oiseaux chante et… » ... Et il ne voulait toujours pas parler. Elle échappa alors un léger rire cristallin qui, s'il avait été un homme tout ce qu'il y a de plus normal, l'aurait fait sourire. Mais lui, il ne souriait pas. « Je voulais juste un bonjour… » Silencieux, le garçon se releva et se retourna pour lui faire face, la détaillant avec insistance. Il était doué pour ça Tadeck, fixer les gens. C'était ce qu'il faisait de mieux. Parfois même, il s'installait dans un lieu public et il observait les gens. Comme les scientifiques observent les singes. Mais le sujet n'était pas là. Le problème avec Iseult, c'était que justement, il n'y avait pas de problème. Elle parlait pour lui sans problème, elle anticipait ses réactions parfois, elle le forçait à sortir de son quotidien et qui plus est... Elle connaissait ses limites et ne lui en demandait jamais trop. Oui, c'était ça le problème. Quand les gens lui en demandait trop, il faisait mine de se braquer et donc, ne donnait rien du tout. Mais là, elle avait juste voulu un bonjour. Et en tant que personne parfaitement éduquée, Tadeck aurait pu être en mesure de lui donner. Seulement voilà, il n'en avait pas ressentit l'envie. Et Iseult s'en retrouvait offensée et offusquée, parce qu'elle savait qu'il en était capable.

D'apparence calme et imperturbable, il avait capté son regard sans ciller. Et, sans crier gare, il jugea alors utile de répondre à tout ça. Une réponse encore une fois, qui pourrais ne pas plaire à Iseult. Ne pas être celle qu'elle avait espérée. « Tu voulais juste un bonjour, et moi je ne voulais pas te le donner. Il a fallut faire un choix, je l'ai fait, tu l'as mal interprété. Tu penses que je fais ça contre toi, alors que je fais ça pour moi. C'est différent. Mais c'est comme ça. » Voilà, point à la ligne. Discussion close, enterrée, oubliée. Ou en tout cas, c'était ce qu'il aimerait. Et finalement, ce fut d'une voix plus froide et autoritaire qu'elle termina : « Tu en as pour longtemps ? J’avais dit à mes parents que je restais ici, mais tout compte fait, je suis pas sûre d’en avoir envie. Je vais aller voir Disturbia. Le temps est beau. C’est idéal pour une promenade. Soit. J’aimerais savoir pour combien de temps tu en as ? Histoire que je revienne avant que tu ne partes. Ou que j’attends que tu ais fini pour partir… Soit. Je ne voudrais pas laisser la maison sans surveillance… » Disturbia. Encore et toujours. Même si l'expression de son visage n'avait pas changé et qu'il semblait se foutre royalement de ce qu'elle venait de lui dire, à l'intérieur, c'était Bagdad. Il n'aimait pas Disturbia. Il le jalousait même ! Parce qu'il n'était pas comme lui, parce qu'il apportait quelque chose à Iseult que lui ne pourrait jamais lui offrir. C'était frustrant, énervant, inquiétant, décevant. Il se sentait faible et impuissant, comme battu d'avance. Battu par quelqu'un qui ne savait même pas que Tadeck pouvait être un adversaire. Il resta songeur, comme s'il réfléchissait à la meilleure réponse qu'il puisse donner. Iseult ne devait pas savoir qu'il ne voulait pas qu'elle aille rejoindre cet homme. Tadeck n'était pourtant pas quelqu'un de jaloux. Et il n'était même pas sûre que cela soit de la jalousie qu'il ressente à son égard. Non, c'était autre chose. Comme s'il savait que Disturbia ne pourrait pas lui faire du bien. Oh certes, lui non plus ne lui en faisait pas. Mais la question n'était pas là. Finalement, d'une voix complètement détachée il finit par répondre : « Je n'en ai pas pour longtemps. Tu ferais mieux de rester, sinon tu devras t'interrompre pour moi et je ne veux pas te déranger dans ta journée. Je ferais vite... » Non, évidemment qu'il ne fera pas vite. Il allait prendre tout son temps pour pouvoir la garder auprès de lui. Et non, Tadeck n'avait pas fait appel à son côté machiavélique -il n'en avait pas- pour concocter cette idée ridicule. Il n'en avait même pas conscience. C'était comme si parfois, son corps prenait le dessus sur son esprit sans même qu'il ne s'en rende compte. Poussé par un instinct inconnu, Tadeck fit un pas dans sa direction. Mon dieu, il venait lui-même de réduire la distance qui les séparait. Oui, lui qui passait son temps à l'agrandir. Panique. Énorme panique. Comme d'habitude, il semblait calme et sur de lui. Mais il ne l'était pas. Dire quelque chose, vite. Se sauver la face, mentir, inventer n'importe quoi pour expliquer ce geste peut-être anodin aux yeux de certains, mais tellement lourd de sens en vérité. Sa gorge se serra et sans réfléchir, il prononça juste ces trois mois : « J'ai soif. » Simple, efficace.
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Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT Empty
MessageSujet: Re: Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT   Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT EmptySam 16 Juil - 19:07

Un jour, un abruti avait osé dire que les opposés s’attiraient. Qu’il y avait entre eux une sorte d’alchimie inexplicable. Un besoin étrange de s’assembler pour faire un tout. Comme un puzzle que l’on essaye de reconstituer. Deux pièces différentes. Aux courbes et aux couleurs dépareillés. Deux pièces sans véritable lien. Et, par un heureux hasard, il suffisait de les unir pour que leur tout représente une chose. Une chose étrange qui ne trouverait jamais de définition et à qui on ne trouverait jamais le nom adéquat. Une espèce de truc, un machin… N’était-ce pas étrange qu’une simple chose soit autant sollicitée par le genre humain ? Un vulgaire sentiment, un absurde besoin d’appartenance à la société. Parce qu’au fond, il s’agissait de cela. Assemblez un puzzle et constatez qu’il ne s’agit en fait que d’un quartier d’éléphants roses que l’on essaye d’unir sur une même place. Une image un peu ridicule et sans fondement, mais une image qui plaisait à Iseult. Parce que là, planté devant Tadeck, c’était des centaines d’éléphants roses avec des plumes aux fesses qu’elle imaginait. Elle les voyait formé une ronde immense où tous se complaisait dans une danse un peu étrange. C’était sa manière à elle d’oublier. Oublier que ce foutu con avait menti. Les opposés ne s’attiraient pas. Elle l’avait toujours su mais aujourd’hui, elle en avait la preuve sous les yeux. Cela ne lui avait jamais posé problème jusqu’à lors. Elle avait toujours pour habitude de s’accommoder aux autres et ce, peu importe leur manière d’être. Oppositions ou ressembles, finalement, ça n’avait pas d’importance. Tant qu’il y avait une personne dans ce monde capable de lui montrer que l’humanité avait du bon. Mais en ce jour, les choses lui paraissaient soudain différentes. Elle aurait prié pour que ce vieil adage soit véridique. Elle aurait prié pour former un tout avec une autre personne. Avec Tadeck. Elle n’avait jamais réalisé combien ce qu’elle pouvait ressentir était fort et combien ce qu’il pouvait penser d’elle avait de l’importance. Tout ce qu’elle disait ou faisait était désormais lié à lui. Sa respiration ne trouvait son souffle que dans les siens, ses yeux ne voyaient qu’à travers lui… Elle formait une sorte de tout avec lui et elle avait l’impression d’être la seule à l’avoir remarqué. Alors non, les opposés ne s’attiraient pas. C’était loin d’être cela. On aurait plutôt dit deux aimants qui ne pouvaient vivre ensemble sur le même frigo. Comme si tout cela était insupportable et que le dégoût ne permettait guère plus de rapprochement. Était-elle pour le jardiner cet aimant de trop sur le frigo ? Perdue au milieu de ses éléphants, elle savait que sur le réfrigérateur de son ami, il n’y avait jamais eu qu’un seul et unique aimant. Lui. Et qu’il était incapable d’en accueillir d’autres. Était-ce parce qu’ils étaient différents ? Si opposable, si contraire ? Ou était-ce simplement lui qui n’était pas prêt à faire de la place à quelqu’un dans son cœur ? La question lui martelait la tête alors qu’elle rêvait de trouver une réponse. Tadeck, crois-tu qu’un jour nous pourrions trouver place sur le même bâtiment ? Crois-tu que les éléphants pourraient nous accepter dans leur monde, toi et moi ? Elle aurait été capable de le demander. Mais le mal qu’elle avait causé était déjà si tangible qu’elle n’avait pas envie de se risquer à un tel jeu. Et si…

Et s’il se rendait soudainement compte qu’il avait perdu un temps précieux avec elle ? Et si elle n’était pour lui qu’une épine dans son pied ? Sa présence lui infligeait-elle une douleur aussi exaspérante ? Elle espérait de tout cœur que ce n’était pas le cas. Elle avait l’espoir qu’elle n’était pas pour lui qu’une simple enquiquineuse qu’il fallait bien supporter une fois de temps en temps. Et soudain, l’idée qu’il n’avait été sympathique envers elle que pour une seule et unique raison la frappa. Tadeck Nosborn n’avait pas enduré sa présence avec plaisir ou même avec une once d’envie. Elle avait simplement été le lot qu’on offrait avec le travail qu’il était venu chercher auprès de ses parents. Comment avait-elle pu penser que leur quelques visites dans sa galerie faisait d’elle quelqu’un de plus important ! Les éléphants disparurent alors pour ne laisser place qu’au néant. Son cœur fragile se brisa silencieusement. Elle sentait en elle ses millions de particules s’éparpillées. Elle avait eu l’espoir trop vaste d’être importante, enfin. Mais elle ne l’avait jamais été pour personne. Aussi, lorsqu’elle avait fait remarquer qu’il était fâché et qu’il n’avait pas daigné répondre, elle avait su qu’elle était tombée juste. Après tout, ne dit-on pas qui ne dit mot consent ? Elle croisa alors les bras sur sa poitrine. Un jour, elle avait lu dans un magazine féminin qu’il s’agissait d’un geste de fermeture à éviter lors de situation de communication. Mais qu’importe ! Il n’y avait aucune communication possible entre Tadeck et elle. Iseult, un Peter Pan émasculé et Tadeck, une Wendy bien trop silencieuse. Mais où était-il leur monde imaginaire ? Un monde qu’ils pourraient supporter à deux. Un monde qu’ils pourraient apprécier et chérir ensemble. Ou peut-être, simplement, pourraient-ils devenir amis. Au fond, elle n’avait jamais rien demandé de plus. Elle ne voulait pas l’impensable. Ses paroles révélaient d’ailleurs bien le fond de sa pensée. Elle ne voulait rien si ce n’est un minimum de politesse. Elle voulait un bonjour. Une preuve qu’il l’avait remarquée. Une preuve qu’il faisait attention à elle malgré tout et qu’elle n’était pas aussi futile à ses yeux que la dernière montre de Cartier. Mais elle savait qu’elle avait tort d’espérer pareil chose de Tadeck. Jamais il ne lui donnerait une raison de croire en sa part d’humanité. Il semblait si fermé aux autres et à la vie en général. Comment avait-elle fait pour tomber irrémédiablement sous son charme ? Il n’eu qu’à la regarder pour que la réponse lui saute aux yeux. Il y avait dans son regard un vide intersidéral. Un si grand vide qu’elle se plaisait à imaginer qu’un jour, elle le comblerait d’étoile. Un peu de bonheur. Un peu de folie. Un peu de vie, simplement. Mais ne se prenait-elle pas un peu pour Dieu, Iseult ?

Une chose est sûre, lorsque son regard s’arrêta sur elle sans ciller un seul instant, son cœur déjà brisé cessa de battre. Souvent, elle se demandait s’il ne voulait pas la tuer de son regard transperçant. Elle avait le cœur si fragile et avec une telle maladie, un rien aurait pu lui faire perdre pied. Totalement et de manière incompréhensible. Mais alors elle se reprenait en se répétant sans cesse que s’il voulait la tuer, c’est qu’il lui accorderait une importance. Même infime. Mais puisque ce n’était pas le cas… Et alors qu’elle ne l’attendu plus, la réponse à ses monologues sans fin se fit entendre. Subjuguée et le souffle coupée, alerte, Iseult écouta chaque mot avec une attention qu’on lui connaissait peu. Elle avait toujours été si distraite et comme n’importe quel enfant, elle ne s’intéressait qu’à son pauvre nombril. Mais pas avec lui. Peut-être parce que justement, il était loin de ressembler à tout ce qu’elle avait pu connaître dans sa courte existence insignifiante. « Tu voulais juste un bonjour, et moi je ne voulais pas te le donner. Il a fallut faire un choix, je l'ai fait, tu l'as mal interprété. Tu penses que je fais ça contre toi, alors que je fais ça pour moi. C'est différent. Mais c'est comme ça. » La demoiselle se répéta les mots inlassablement alors qu’elle gardait le silence. Tout bonnement incapable de comprendre ce qu’il voulait dire. Pourtant, elle ne voulait pas que les choses se passent de cette façon. Elle voulait comprendre et elle voulait ouvrir le dialogue. Bien sûr, il était loin d’être le locuteur parfait mais le fait qu’il lui prononce ces quelques mots lui redonnait malgré tout l’espoir. Bon, d’accord, il n’avait pas dit ce qu’elle avait voulu entendre. C’était la chose la plus horrible qu’on lui jamais dite, d’ailleurs. A bien y réfléchir, elle se sentait insultée parce qu’il venait de dire. Alors, bouche ouverte, elle le regarde un moment sans trouver quoi dire. « Alors, finalement, tu dois endurer ma présence c’est ça ? » La question avait quitté ses lèvres sans qu’elle ne puisse la retenir. Elle ne voyait pas d’autres explications logiques à ce qu’il venait de dire. Tout cela n’avait aucun sens pour elle. Pourquoi ne lui ouvrait-il pas la porte de ses secrets ? Peut-être les choses seraient plus simple par la suite… Mais elle savait que c’était tout bonnement impensable et n’attendant même plus de réponse à sa question, elle retourna vers sa table pour y ranger le bordel qu’elle y avait mis. Jamais elle n’avait déjeuné sur cette foutue terrasse en vingt-deux d’existence et pour un jeune homme dont elle ignorait presque tout, elle avait fait cet exploit. Et la récompense qu’il lui offrit pour cela l’avait fait si bien déchantée que jamais plus elle ne se risquerait à un déjeuner en plein air. Pendant qu’elle faisait ses allées et venues entre la maison et la terrasse, elle pensa à ce qu’elle pourrait faire pour l’éveiller un peu et le sortir de sa drôle de léthargie. Mais les idées lui manquaient et même si la colère la dominait, l’envie de rester à ses côtés la paralysait quelque peu. Mais une idée folle lui traversa l’esprit…

La jalousie. Elle voulait tester Tadeck. Et elle n’avait eu qu’une idée enfantine pour cela. Eveiller chez lui un sentiment que seuls les passionnés peuvent véritablement ressentir. Un brin de jalousie. Et puis, ce n’était pas véritablement un jeu de sa part. Iseult avait toujours eu une attirance pour Disturbia. Il était un peu comme son premier amour. Avec lui, elle ne s’ennuyait jamais et ils rigolaient souvent. La joie de vivre qu’il faisait naitre en elle était un exploit qu’il était le seul à réaliser. Mais depuis qu’elle avait rencontré Tadeck, cette joie n’était plus complète. Elle avait l’impression qu’il y manquait quelque chose. Avait-elle pu tomber amoureuse de deux personnes à la fois ? La chose était possible, mais elle ne l’imaginait pas. Lorsqu’elle était avec Tadeck, elle pensait rarement à Disturbia. Sauf en cas d’idée saugrenue tel que d’éveiller une jalousie latente. Mais lorsqu’elle se trouvait en compagnie de son ami, elle pensait souvent à Tadeck. Parfois, sans qu’elle n’y prenne garde, elle voulait dire des choses sur lui. Se confier. Raconter combien la beauté de ses yeux lui manquait et combien la douceur de sa peau lui faisait envie. Elle ne l’avait pas touché souvent mais ces contacts avaient suffit à la rendre sensible à lui, à son odeur et à toutes ces petites choses qui formaient sa personne. Mais lui, il n’avait jamais aimé ça. Il n’y avait qu’à repensé à cette manière qu’il avait eu de rejeter sa main quelques minutes auparavant. Comme s’il n’avait s’agit que d’une vulgaire bestiole arrivée là par hasard… Malgré ça, malgré tout, Iseult ne pouvait se résigner à laisser tomber. Et c’était avec un énervement – feint par moment – qu’elle lui demandait s’il en avait pour longtemps ou si elle pouvait mettre les voiles pour retrouver Disturbia. Si Tadeck tenait à elle, peut-être essaierait-il de la retenir. Oui, et c’était le cas, serait-ce pour les raisons qu’elle imaginait ? Peut-être, peut-être pas. Avec Tadeck, Iseult n’était jamais sûr de rien. C’était comme sauté en parachute chaque jour. Mais chaque jour, elle se rapprochait un peu plus du sol. Un jour, elle finirait par s’écraser. En beauté. Serait-il alors heureux de voir ce qu’il avait fait d’elle ? Une sorte de petite princesse égratignée par la vie et par un prince trop froid. De toute façon, elle avait toujours su que les contes de fées n’existaient pas. Même si toute sa vie n’était construite que sur un rêve. C’était la princesse ronce et elle dormait depuis des milliards d’années… A son réveil, tout serait différent et le rêve prendrait fin. Plus de Tadeck, plus de souffrance ! Sans doute plus de solitude et ça, elle n’était pas certaine de pouvoir y faire face. Pourtant, il fallait qu’elle aille au bout de ses agissements et de ses idées. Il fallait qu’elle risque le réveil. Peut-être ne serait-il pas aussi horrible qu’elle ne l’imaginait. Oui. Peut-être. Mais trop de peut-être pour que tout cela soit véritablement ce qu’elle espérait.

Et finalement, elle se retrouvait là, face à lui et un peu perdue. Ce qu’elle venait de dire lui ressemblait mais l’exaspération que l’on pouvait facilement ressentir était loin d’être chose courante chez la demoiselle Jenkins. Iseult avait toujours été trop bavarde mais jamais froide. Comme quoi, il fallait un début à tout. Décidément, Tadeck faisait naitre chez elle bien des choses insoupçonnées. Et alors qu’elle se demandait s’il allait lui répondre ou simplement la snober, comme à chaque fois, la voix détachée du jeune jardinier s’éleva. « Je n'en ai pas pour longtemps. Tu ferais mieux de rester, sinon tu devras t'interrompre pour moi et je ne veux pas te déranger dans ta journée. Je ferais vite... » Iseult retint un sourire. Elle ne savait pas si les raisons qu’il venait d’énoncer étaient les seuls mais le fait qu’il ne veuille pas la déranger lui mettait du baume au cœur. Peut-être avait-il dit ça par politesse, après tout. Mais elle avait pu constater que la politesse n’était pas toujours compatible avec le Nosborn. Elle s’apprêtait à lui répondre quelque chose lorsqu’il fit soudain un pas vers elle. Décontenancé, sa bouche s’ouvrit timidement. C’était bien la première fois qu’il venait vers elle de cette façon et elle se sentait soudain très fébrile. C’était certain, son cœur allait lâcher. Aujourd’hui même. Mais une drôle de petite voix dans sa tête lui disait qu’elle mourrait d’envie de succomber dans ses bras. Parce que les bras avaient sans doute déjà un goût de Paradis. Sauf qu’encore une fois, elle s’était fait de bien jolie film la douce enfant. Certes, les rêves étaient très beaux mais leur problème était qu’ils n’étaient fait que pour être rêver. Quand l’enfant l’apprendrait, les choses perdraient bien de leur sens. « J'ai soif. » C’était-elle attendu à cela ? Non. Certainement pas. Elle fait même d’ailleurs complètement anéantie par cette révélation absurde qui, pour elle, n’avait aucun intérêt. Qu’est-ce qu’elle en avait à faire, hein ? Il savait où se trouvait la maison, il n’avait qu’à faire comme chez lui ! Et la colère qui avait habité la jeune fille quelques minutes auparavant refit surface plus violemment cette fois. Elle en avait marre d’espérer toujours ces choses qui ne venait pas. Ses pas en avant qui finalement, n’était que façon de plus de se moquer d’elle. Oui. Il se moquait d’elle. Il voyait le tourment dans ses yeux et les sentiments qu’elle pouvait ressentir et cela le motivait à se moquer d’elle. Il s’agissait bien de cela, pas vrai ? Peu importe après tout car même si ce n’était pas le cas, Iseult ne penserait jamais autrement. Elle se sentait trahie par un être aimé. Comme s’il lui avait fait une promesse. Or, ça n’avait jamais été le cas. Tous ces éléphants lui avaient visiblement réduit le cerveau à néant. Et malheureusement, la déception était clairement visible sur son visage.

C’était encore une de leur nombreuse différence. Iseult avait toujours exprimé ses sentiments avec trop d’exagération et avec une facilité déconcertante. Alors que Tadeck, lui, il n’éprouvait jamais rien. Du moins, c’était l’impression qu’il donnait. Et cette impression causait bien des tracas à la jolie blonde. Alors, d’une voix éteinte elle murmura : « Je vais te chercher ça. » Elle tourna alors le dos et d’un pas lent, elle se dirigea vers la petite maison. A peine eut-elle mis un pied à l’intérieur qu’une larme ruissela le long de sa joue. Iseult avait toujours excessive. A cause de sa maladie, ses émotions lui semblaient décuplées. Dans le frigo, elle trouva une petite bouteille d’eau et s’en empara. D’un revers de la main, elle essuya la larme outrageuse qui allait lui faire honte. Et il se redirigea vers le jardin ou son… Son quoi ? Son ami, son jardinier ? Elle ne savait même pas le qualifier ! Bref, peut importe son statut, il l’attendait. Elle s’approcha alors de lui et soudain, la tristesse disparu complètement et seule la colère dirigea ses gestes. Elle s’approcha d’un pas rapide et lui lança la bouteille en plein visage. « Tiens, vas-y, désaltère-toi ! Tu ne sais rien faire d’autre que penser à ta petite personne de toute façon. Tu crois sérieusement que je vais passer ma journée à t’attendre ? Et puis, tu l’as si joliment fait remarquer tout à l’heure : je te gêne plus que je ne te suis utile. Alors tu vas bouger ton cul et faire ton travail à la con, D’ACCORD ? » Sa voix avait été dur alors qu’elle avait continué à s’approcher tout en lui hurlant ses mots au visage. Bien sûr, elle ne le pensait égoïste et elle savait que c’était quelqu’un de bien. Simplement, il ne savait pas le montrer et ça, ça la gênait. Le provoquer n’avancerait à rien mais ne rien faire non plus et Iseult était loin d’être ce genre de nana à qui on dit « sois belle et tais-toi. », bien au contraire. A bout de nerfs, elle serra alors les poings et se mit à tambouriner sur la poitrine du jeune homme tout en se libérant de bien des paroles sans intérêt et sans le moindre sens : « Pourquoi tu me fais ça, hein ? POURQUOI ? Je suis si envahissante que ça ? Je suis si inutile ? Je sais bien que je ne suis personne pour toi et je ne te demanderai jamais de changer ça si tu n’en as pas envie mais j’en ai marre d’être ignorée ! TU FAIS QUOI DANS TA GALERIE ? Tu refuses de saluer les gens ? Pas contre eux bien sûr, POUR TOI. TOUJOURS POUR TOI ! Tu m’énerves ! J’ai le cœur qui s’emballe. » Et à ses derniers mots, elle s’arrêta net de bouger et se laissa glisser au sol, fébrile. Et comme une enfant soudain apaisé par un baiser de sa mère, elle se mit à déchirer des brins d’herbe un à un. Elle ne dirait plus rien. Elle était fatiguée. Fatiguée de voir que tout cela n’avait pas d’importance. « Fous le camps. Je dirai à mes parents que tu as du partir. Je veux pas t’infliger mon horrible présence plus longtemps, alors casse-toi. » Jamais Iseult ne s’était montré si dur. Est-ce que l’amour devait toujours faire aussi mal ? Andréa, Tadeck… Cupidon avait décidemment un problème avec elle et ses flèches atteignaient les mauvaises personnes. Tadeck et Iseult. Iseult et Tadeck. Non, vraiment. Il n’y avait rien d’un Roméo et Juliet là dedans. Princesse ronce venait de se réveiller de son long et pénible sommeil.
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MessageSujet: Re: Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT   Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT EmptyJeu 22 Sep - 19:06

Jamais Tadeck ne pourrait avouer à Iseult qu'il l'avait remarqué. A quoi ça rimerait ? A rien ! Ce serait si dérisoire, si futile... Iseult serait alors gonflée d'un espoir inexistant, car Iseult était ainsi. A chaque pas que Tadeck ferait, elle en réclamerait un autre. Oh certes, pas grand chose, un petit, rien qui ne semble impossible à première vue. Mais à force de faire un pas, puis un autre, et encore un autre... On avait traversé la route sans même s'en rendre compte. Et ça ne pouvait pas arriver. Ça ne devait pas arriver. Car cela reviendrait à se mettre à nu face à elle, à sortir de sa coquille, à abaisser sa garde. Et même si un jour l'envie lui en disait, il ne pourrait s'y résoudre. Il avait eu trop mal déjà. Il était né dans une coquille et les rares fois où il avait osé n'en sortir que partiellement, il s'était ramassé la gueule en beauté. Il ne voulait plus connaître ça. L'échec, la déception, la colère, le dégoût... Oh, pas chez lui évidemment. Non parce que lui était tout bonnement incapable de ressentir quoi que ce soit. Non, ce qu'il redoutait le plus c'était d'éveiller ça chez les autres. En fait, la simple idée de provoquer la plus misérable des émotions chez quelqu'un l'effrayait et lui donnait envie de fuir. Il aimerait tellement qu'on l'oublie. Non, en vérité, il ne voulait pas être oublié. Il voulait juste n'être personne. Juste... Tadeck. Que si quelqu'un de nouveau arrivait et demandait aux gens : qui est cet homme là-bas, tout seul ? Qu'on lui réponde : C'est Tadeck. Mais que si on posait la question : Mais qui est-il ? Là oui, il voudrait que personne ne sache y répondre. Que personne ne sache rien sur lui, que personne ne s'attache à lui, que personne n'attende rien de lui. Mais Iseult attendait tellement elle. Il le savait très bien. Il le voyait dans ses grands yeux innocents. Il y avait cet espoir perçant d'une suite meilleure. Une lueur qui ne semblait pas pouvoir se consumer. Et Tadeck ne comprenait pas. Oui, il ne comprenait pas ce qui rattachait Iseult à lui. Il ne faisait pas partis de ces hommes sur lesquels les femmes se retournent dans la rue jusqu'à s'en briser la nuque. Il n'était pas de ces hommes charismatiques qui fascinaient par leurs beaux discours. Il n'était pas de ces Dom Juan qui savent séduire les femmes. Il n'était pas de ces hommes drôles qui savent rendre une femme heureuse. Il n'était pas de ces hommes timides et maladroits que les femmes trouvaient touchants. Il n'était rien de tout ça. Il était distant, silencieux, éteint. Que pouvait-elle donc lui trouver pour qu'elle s'évertue ainsi à vouloir partager quelque chose avec lui ? Ne serait-ce qu'un échange de politesses ! Ça le dépassait totalement et il ne comprenait pas. Il y avait réfléchit pourtant, il s'était creusé la tête. Mais rien ne lui venait. Il n'était pas riche non plus, loin de là même. Il n'était que... le jardinier. Il n'avait pas un corps d'apollon, il n'avait pas la peau luisante sous le soleil, il n'avait pas un beau sourire -enfin ça il n'en savait rien puisqu'il ne souriait pas- il n'avait pas un regard qui faisait rêver. Non, il ne comprenait pas. Les filles étaient un mystère que jamais personne ne pourrait lever. Et c'était peut-être mieux ainsi. Oh ! mais attendez. N'allez pas croire non plus que Tadeck pensait "plaire" à Iseult. Non, loin de là. Jamais il ne pourrait s'aventurer à imaginer une telle chose. Ça ne lui traverserait jamais l'esprit. Entendons-nous bien : jamais. Non, il ne comprenait juste pas pourquoi elle tenait tant que ça à ce qu'il lui témoigne le moindre intérêt. C'était bien vrai après tout... qu'est-ce que ça pouvait lui faire à elle ? C'était une femme brillante, resplendissante et avenante. Elle devait s'entourer de personnes sans aucun soucis. Tadeck n'était qu'un objet encombrant. Vous savez, cet objet au bord de votre commode dans le salon. Vous ne savez plus où vous l'avez eu, ni pourquoi il est là. Il n'est pas franchement beau, il ne s'accorde pas avec le reste, il fait tâche dans le décor. Jusqu'au jour où suite à un geste maladroit, on l'expédie au sol et il se brise en mille morceau. Et puis, jeté dans une poubelle, vous l'oubliez aussitôt. Oui, Tadeck c'était exactement ça. Il rentrait dans votre vie on ne savait comment. Rapidement, vous vous rendiez compte qu'il n'avait rien à faire là. Alors, sans trop y faire attention, vous l'éjectiez de votre vie. Et ce rejet était semblable à une longue chute. On le brisait, et on l'oubliait. Point barre. Tadeck s'y était habitué. Du moins, il essayait.... Oui, il essayait de toutes ses forces... Il essayait.

Mais au fond, est-ce que cet "acharnement" ne lui plaisait pas ? Tadeck n'en savait rien. Il n'était pas du genre à se poser des questions existentielles, à s'endormir le soir en se ressassant tout ce qu'il avait vécu dans la journée, à chercher des solutions. Ou des problèmes, certains étaient doués pour ça. Non, Tadeck se couchait et s'endormait. Aussi vide qu'un coquillage. Solide en apparence. On veut l'ouvrir, découvrir ce qu'il contient, ce qu'il cache, ce qu'il renferme. Mais une fois fait, on est déçu. Parce qu'il n'y a rien. Juste une enveloppe corporelle, rien d'autre. Alors, fâché, frustré, on jette le coquillage au sol et on l'écrase. Et dans un craquement léger il se brise sous le poids de notre colère. Il en était de même pour Tadeck. On le brisait comme on coupe une brindille. C'était facile, un véritable jeu d'enfant. Mais au fond, on n'en tirait pas la moindre jouissance. Parce qu'il restait impassible. Parce qu'il se laissait faire, comme si ça ne l'atteignait pas. Il ne se défendait pas, ne ripostait pas et ne se vengeait pas. Il se laissait faire, comme s'il l'avait bien mérité. A croire même que son regard calme vous remerciait de lui faire mal. Comme s'il disait : allez-y, je suis un monstre, faites-moi mal, ça n'a pas d'importance. Tadeck était si dur avec lui. Trop dur même. Il ne méritait pas cette vie de réclusion, cette vie de solitaire. Parce que Tadeck était quelqu'un de bien. Un gentil garçon. Qu'il était intelligent et cultivé. Et qu'il débordait d'envie de partager tout ce savoir. Mais il ne le faisait pas, car il s'en pensait indigne. Et plus il regardait Iseult, plus il se rendait compte ô combien elle méritait mieux que lui. Elle ne devrait même pas lui adresser la parole et perdre une seule seconde avec lui. Alors, patient, il s'évertuait à la repousser. Il le faisait pour lui, certes. Mais pour elle aussi. Même si c'était trop affreux à avouer, il le faisait : elle avait besoin d'un homme comme Disturbia. Pas comme lui. Il ne ferait que lui empoisonner l'existence, lui compliquer la tâche. Il n'était qu'un jardinier, et il était préférable que cela reste ainsi. Pour le bien de tout le monde.

Calme, inlassablement calme, Tadeck lui avait expliqué la raison de son refus. Il lui avait expliqué avec précision pourquoi il ne lui avait pas dit bonjour. Il avait fait l'effort d'aligner plus de deux mots à la suite. Pour elle. Pour être sincère. Mais évidemment, ça n'eut pas l'effet escompté. Et de toute façon... quel était l'effet désiré ? Aucun. Tadeck ne s'attendait à rien, n'espérait rien. Il agissait, et qu'importe les conséquences. Iseult en sembla terriblement offusquée. Blessée peut-être même. La bouche entrouverte, ils se jaugèrent un instant, la jeune femme ayant visiblement du mal à encaisser les paroles de Tadeck. Voilà pourquoi il valait encore mieux qu'il se taise. Là au moins, elle avait le loisir d'imaginer ce qu'elle voulait. Alors que, lorsqu'il parlait, il faisait mal. Pas volontairement, non. Mais parce que parfois, la vérité est plus douloureuse qu'on aurait voulu le croire. Malheureusement pour la belle enfant, Tadeck était incapable de préserver les gens par de vils mensonges. Il ne savait pas mentir. Il ne voulait pas mentir. Il n'avait d'ailleurs jamais mentis de toute sa vie. Jamais. Et personne ne changerait ça. Pas même Iseult, autant d'impact ait-elle sur lui. Planté devant elle, Tadeck attendait. Une réponse, une réaction, quelque chose, afin qu'il puisse retourner à son travail. Après tout, les parents d'Iseult le payait pour ça et non pas pour faire la conversation à leur fille. Enfin... façon de parler. Se décidant enfin, la jeune femme, visiblement touchée en plein cœur, rétorqua sèchement : « Alors, finalement, tu dois endurer ma présence c’est ça ? » Non, ce n'était pas ça. Impassible, Tadeck la toisa quelques secondes. Pourquoi fallait-elle toujours qu'elle cherche à interpréter tout ce qu'il disait et faisait ? Elle se trompait presque à chaque fois. Elle se faisait du mal toute seule, de façon totalement inutile. Il n'en valait pas la peine. Il aurait pu dire quelque chose, la rassurer, contrer sa phrase. Mais il n'en fit rien. Peut-être qu'au fond, c'était mieux qu'elle imagine une telle chose. Si ça pouvait l'aider à passer à autre chose, c'était mieux. Alors, dans un geste lent et parfaitement maitrisé, il se détourna et retourna à ses occupations. Non, vraiment, sa présence n'avait rien d'une tare. Bien au contraire. Il aimait la sentir non loin de lui, la savoir à proximité. Il ne ressentait pas le besoin de lui parler, ni d'échanger quoi que ce soit. Sa simple présence suffisait à le satisfaire. Mais ça aussi, elle ne le saurait certainement jamais. S'en était triste à mourir, oui, en effet. Mais c'était comme ça. Et Iseult finirait par se lasser elle aussi. Comme toutes les autres qui avaient tentées. Elle s'en irait avant d'avoir trop mal et elle le laisserait à sa misérable condition. Condition dont il se contentait très bien jusqu'à lors. C'était certes particulièrement attristant comme vie, mais Tadeck y avait trouvé un certain équilibre, une certaine sécurité. Et il ne pouvait pas laisser qui que ce soit venir tout chambouler. Parce qu'il ne savait pas comment faire dès qu'il se retrouvait en dehors de sa petite bulle égoïste. Pourtant... pourtant il n'était pas égoïste. Juste.. effrayé. Effrayé par ce monde, par ces gens, par tous ces sentiments qui habitaient l'être humain. Et il fuyait, encore, encore et encore. Comme une course perdue d'avance. Mais il continuait de fuir tant qu'il le pouvait encore. Jusqu'à ce faire totalement dévorer par une société inadaptée à ses souffrances. Ce jour arriverait, tôt ou tard. Et il ne donnait pas cher de sa peau.

Elle se mit alors à faire de nombreux aller-retours entre l'intérieur de la maison et la terrasse, débarrassant son petit déjeuné. Cette colère refoulée mais palpable à des kilomètres le laissait de marbre. Les mains dans la terre, il continuait son boulot, imperturbable. Mais bientôt, elle vint se planter non loin de lui, déterminée et froide. Iseult, froide ? Il semblait que oui. Ça aurait pu être déroutant en effet. Mais il s'agissait de Tadeck. Rien ne le déroutait. Ne s'arrêtant pas pour elle, il l'écouta parler. Elle lui parla alors de Disturbia, lui expliquant qu'elle voulait aller le voir, lui demandant alors pour combien de temps il en avait encore. Tadeck restait imperturbable, se concentrant sur ce qu'il faisait tout en lui prêtant un oreille attentive. Disturbia. Oui, c'était bien vrai que ça lui faisait étrange lorsqu'elle parlait de lui. Il était tiraillé entre deux émotions. Une certaine tristesse, parce qu'il savait que jamais il ne pourrait être comme cet homme qui semblait tant la combler de bonheur. Mais il éprouvait tout en même temps une certaine joie, véritablement heureux pour elle qu'elle ait trouvé un homme comme lui. Il n'y avait pas de jalousie dans ce qu'il ressentait. Il n'en avait jamais ressentit, il ne savait pas ce que c'était. Tadeck était bien trop altruiste pour ressentir ce genre d'émotion aussi égoïste. Oui, c'était totalement contradictoire puisque d'une certaine façon, égoïste il l'était. Mais en même temps, il ne l'était pas. Bref, une fois encore, tout en lui n'était que casse-tête. Et n'allez pas croire que pour lui, c'était une partie de plaisir. Bien au contraire, il s'y perdait tout seul et ça avait le don de, malheureusement, le repousser encore plus dans ses tranchées, se refermant toujours plus au monde extérieur. Il lui avait donc sagement répondu, lui expliquant qu'il ferait au plus vite et qu'il était préférable qu'elle reste afin de ne pas la déranger en plein milieu. Soucieux des autres, ça oui il l'était. Mais ça ne se voyait que dans ces petits moments là. Autrement, il ne le montrait pas. Il n'avait pas envie qu'on le remercie, qu'on lui soit reconnaissant. Il voulait faire sa petite vie en paix et que personne ne s'en soucie. Ne jetant pas un seul regard à Iseult, il ne vit pas son sourire, sa satisfaction et son regard qui de nouveau brillait. Il ne vit rien de tout ça et ce fut peut-être mieux. Deu seul sait comment il aurait pu réagir en réalisant qu'il venait de faire plaisir à Iseult d'une mauvaise manière. Parce qu'elle l'avait prit de façon personnelle, parce qu'elle voyait toujours de l'espoir partout. Et surtout là où il n'y en avait pas il fallait croire. Tadeck c'était redressé entre temps, pour attraper un outils. Et c'est là, peut-être en croisant le regard d'Iseult qu'il se sentit pousser des ailes. Oh je sais, généralement quand quelqu'un ressent ça, il a tendance à courir jusqu'à la personne et lui donner un baiser fougueux. Mais nous parlions là de Tadeck. Tadeck ! Jamais, jamais, jamais il ne pourrait faire ça. JA-MAIS. Néanmoins, il fit quelque chose. Un pas. Juste un pas. Mais un pas vers elle. Et là, il vit dans ses yeux que ses espoirs venaient de redoubler. Catastrophe. Panique. Son cœur s'emballa, et sa température grimpa brusquement, le laissant fébrile. Et aussitôt, il ressentit cet immense besoin incontrôlable de tout arrêter. De tout briser. Pas d'espoirs, pas de sentiments, rien. Rien du tout. Le néant, le vide. Il ne voulait rien ressentir, il ne voulait pas qu'Iseult ressente quoi que ce soit non plus. Et ce fut donc avec 3 simples mots qu'il parvint à tout briser. J'ai soif. Lui avait-il dit d'un ton plat, dénué d'émotions. Et là, devant ses yeux, il assista à la chute d'Iseult. Cette belle enfant. Si fragile. Pas d'espoir avait-il dit. Il était de son devoir de briser ça, mais il ne le faisait pas que pour lui cette fois. Non, il le faisait pour elle. Pour la sauver du pire. Pour la sauver de lui. Lui, le monstre.

La colère. La déception. Le dégoût. Toutes ces choses qu'il redoutait tant... Elles étaient toutes là, dans les yeux d'Iseult. Elle ne pouvait pas imaginer à quel point il se haïssait à cet instant. Non vraiment, elle n'avait pas idée. Parce qu'il était impassible, qu'il la regardait sans ciller, patient, attendant qu'elle lui offre à boire ou qu'elle lui autorise à aller le faire. Mais à l'intérieur... Mon dieu à l'intérieur.. C'était comme si soudainement, le néant avait été frappé par un orage monstre et que les dégâts pouvaient se compter en vie humaine. Ce qui, une fois encore, était totalement paradoxale. Le principe même du néant n'était-il pas : le vide ? Le rien ? Si. Et on ne peut pas briser le "rien". Pourtant, c'était exactement ce qu'il ressentait. Comme s'il venait de trouver pire que le néant. Et il n'y avait pas de quoi s'en venter, soyez-en certains. Le visage de poupée d'Iseult semblait soudainement tiré par une colère dévorante, comme si une douleur affreuse l'obligeait à se contracter de toute part. Et c'était lui qui en était à l'origine. Lui, lui, et encore lui ! Toujours lui. Comment pouvait-il faire autant de mal autour de lui alors qu'il n'aspirait qu'à être loin de tout le monde ? Il n'y comprenait rien et ne savait plus ce qu'il devait faire. La blondinette murmura alors, lassée : « Je vais te chercher ça. » Silencieux, il se contenta de hocher la tête et resta planté là, attendant son retour. Il ne broncha pas lorsqu'elle lui balança la bouteille et la rattraper de justesse, le plastique heurtant légèrement son nez. Et maintenant ? Il n'avait même pas soif. De toute façon, il n'eut pas le temps de faire ou de dire quoi que ce soit. Même pas de la remercier. La voix haut perchée de la jeune femme trancha violemment le silence et ses mots se mirent à pleuvoir comme des coups de poings que l'on assène à l'enfant que l'on bat. « Tiens, vas-y, désaltère-toi ! Tu ne sais rien faire d’autre que penser à ta petite personne de toute façon. Tu crois sérieusement que je vais passer ma journée à t’attendre ? Et puis, tu l’as si joliment fait remarquer tout à l’heure : je te gêne plus que je ne te suis utile. Alors tu vas bouger ton cul et faire ton travail à la con, D’ACCORD ? » Bouteille en main, Tadeck ne bougea pas d'un poil, l'écoutant attentivement. Il avait visiblement réveillé en elle une rage insoupçonnée. Mais ses mots ne lui faisaient pas mal. Il y avait bien longtemps que les mots ne lui faisaient plus rien. Il en avait trop bavé plus petit, il avait apprit à se barricader et depuis, il restait parfaitement insensible à ce genre d'attaque. Non, ce qui lui faisait mal, c'était qu'elle soit en colère par sa faute. Ce n'était pas ce qu'elle disait, mais ce qu'elle ressentait qui le touchait. D'une voix détachée, il répondit simplement : « D'accord. » Voilà encore une réponse à laquelle elle n'avait pas dû s'attendre. Peut-être qu'elle aurait aimé qu'il s'emporte à son tour, qu'il vienne contredire ses paroles. Mais non, il ne fit rien de tout ça. Il approuva, sans la moindre réticence. Il acceptait tout, ça n'avait pas d'importance de toute façon. Il s'apprêta à se retourner, pour terminer son travail et vite partir d'ici, comme elle le lui avait intimé. Mais elle l'en empêcha, ses poings venant marteler brusquement son torse. Surprit de ce geste, Tadeck se recula aussitôt, se braquant et se repliant dans sa coquille. Cela se vit. D'indifférent, il passa à méfiant et nerveux. Ne pas le toucher. Jamais. Pas même pour lui faire mal. La tête légèrement tournée sur le côté, droit comme un "i", il la regardait de biais, comme un animal craintif. « Pourquoi tu me fais ça, hein ? POURQUOI ? Je suis si envahissante que ça ? Je suis si inutile ? Je sais bien que je ne suis personne pour toi et je ne te demanderai jamais de changer ça si tu n’en as pas envie mais j’en ai marre d’être ignorée ! TU FAIS QUOI DANS TA GALERIE ? Tu refuses de saluer les gens ? Pas contre eux bien sûr, POUR TOI. TOUJOURS POUR TOI ! Tu m’énerves ! J’ai le cœur qui s’emballe. » Des mots, encore des mots, toujours des mots. Iseult parlait tout le temps. Elle n'était pas capable de se contenir. Tout ce qu'elle ressentait, tout ce qu'elle pensait... Il fallait qu'elle le dise, qu'elle l'évacue. Ce n'était pas mal. Ce n'était pas bien non plus. C'était comme ça, point. Lui il ne parlait pas assez, et elle, elle parlait trop. Voilà, c'est tout. Mais une fois encore, Tadeck ne comprit pas. Pourquoi passait-elle son temps à tout interpréter bon sang ? Il fallait que cela cesse. Qu'elle arrête de tirer des conclusions hâtives. Tadeck ne comprenait pas le besoin des gens à avoir un statut bien précis. Être l'ennemi de bidule, l'ami de machin, le voisin de truc, l'amour d'on ne savait qui encore. Les mots n'étaient pas toujours bon. Il fallait parfois ne rien dire et prendre les choses comme elle venait. Ne rien attendre de personne, ne rien espérer. Juste s'adapter au moment présent, s'en contenter et s'en réjouir. Mais c'était une chose impossible pour la grande majorité des êtres humains. Un drôle de phénomène qui ne cessait d'inquiéter, d'intriguer et d'effrayer tout à la fois Tadeck. La regardant s'écrouler au sol, fatiguée, vidée, Tadeck ne bougea pas, toujours sur le qui-vive. Il ne la lâchait pas des yeux, surveillant chacun de ses mouvements. Comment pouvait-il réveiller autant de choses en elle ? Ça dépassait son entendement. Il n'avait toujours rien dit, cherchant tout d'abord à se détendre et à remettre son masque d'indifférence. « Fous le camps. Je dirai à mes parents que tu as du partir. Je veux pas t’infliger mon horrible présence plus longtemps, alors casse-toi. » Non, ça ne marchait pas comme ça. Du moins, pas avec Tadeck. Retrouvant une posture plus "détendue", il prit une grande inspiration. Puis, toujours sur le même ton, c'est-à-dire calme et régulier, il répondit : « Non. Je n'aime pas les mensonges. Je ne partirais pas tant que je n'aurais pas fait mon travail. » Silence.

Peut-être que c'était le moment ou jamais de parler un peu, non ? Sûrement. Iseult avait visiblement besoin d'aide. Elle était perdue et elle en souffrait. Mais Tadeck n'était pas elle, il ne comprenait pas, il ne savait pas ce dont elle avait besoin, ce qu'elle attendait de lui. Il se sentait comme... comme un petit enfant dépassé par des problèmes d'adultes. Détournant son regard un instant, il se mit à fixer la bouteille d'eau. Et ce fut en observant ce liquide incolore qu'il trouva la force de parler. Il ne savait pas pourquoi il allait faire ça, ni même si ce serait bénéfique. Mais quelque chose qui lui tordait les entrailles le poussait à le faire. Alors très bien, il allait parler. Il allait dire des choses, il allait expliquer des choses. Il ne savait pas où est-ce que ça conduirait... Mais si Iseult avait besoin de mots pour comprendre, alors pour elle oui, il voulait bien faire cet effort là. Détachant son regard de l'objet, il le remonta lentement jusqu'à Iseult, si fragile sur ce sol. Et il se lança, courageux. Peut-être même téméraire dans son cas. N'étant pas habitué à parler, son petit speech risquait fortement d'être totalement décousue. Mais est-ce que cela avait véritablement de l'importance ? Non, sûrement pas. « Je ne suis pas égoïste. Je fais ce que je peux. Je ne suis pas quelqu'un de bien et tu ne dois pas m'apprécier. Je ne suis pas quelqu'un de bien, je fais du mal. Si un bonjour de ma part peut t'éviter de te mettre dans cet état, je te dirais bonjour. Pas plus. Tu dois arrêter de penser. Je n'ai jamais dit que ta présence m'était désagréable. Je n'ai jamais dit que tu n'étais rien. Ne pas parler ne veut pas dire ignorer. Tu parles trop, je le respecte. Je ne parle pas, respecte-le à ton tour. Il ne faut jamais me toucher. Jamais. Ne recommence plus. N'oublie pas : je ne suis pas quelqu'un de bien. Et il est certain que, plus tu seras loin de moi, plus tu seras heureuse. Je vais retourner travailler et je vais faire vite. Dorénavant, tu demanderas à tes parents de ne plus s'organiser comme ça. Les contraintes ne te réussissent pas visiblement. » Voilà, c'était dit, c'était fait. Qu'elle n'exige plus jamais de lui le moindre mot. Il en avait déjà trop dit et il ne se sentait pas franchement bien. Tous ces mots.... c'était si futiles pour lui, si inutile. Il espérait néanmoins que cela n'avait pas été dit en vain. Et puis, sans se rendre compte de l'impacte de son geste, il laissa retomber la bouteille aux pieds d'Iseult et retourna à son travail. Oui, pour la première fois il ne mesura pas les conséquences de son geste. Il ne se rendit pas compte qu'en faisant ça, il venait lui même de se trahir. Il venait lui-même d'avouer qu'il n'avait pas soif, et que le pas qu'il avait fait dans sa direction était bien plus lourd de sens qu'il ne l'avait prétendu. Vous voyez ? Les mots, ça ne sert à rien.
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Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT Empty
MessageSujet: Re: Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT   Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT EmptyVen 17 Fév - 15:13

Comment expliquer les palpitations de son cœur ? Comment expliquer tout ce qu’elle ressentait sans véritablement la trahir, sans se fourvoyer à un moment ou à un autre ? Iseult avait des étoiles plein les yeux, des étoiles qu’elle avait mis des années à construire, des étoiles qui demeuraient être la seule trace des ses espoirs plus souvent vains qu’utiles. Elle avait des étoiles plein les yeux, pour contenir ceux que d’autres n’avaient pas la force d’avoir. Elle voulait rendre justice à l’espérance, qu’elle ne soit pas restée seule dans la boîte de Pandore aussi longtemps sans raison. Elle voulait vendre de l’espoir, à travers ses rêves éveillés, ses manies d’enfant oubliée. Elle savait que la monde n’avait rien d’une jolie mélodie du bonheur, elle savait que partout des gens mourraient, des gens souffraient. Mais ne se devait-elle pas d’être heureuse pour eux ? Pour tous ceux qui n’aurait jamais la chance de l’être ? Parfois, la plupart du temps même, elle était égoïste et superficielle. S’accordant des plaisirs futiles et des petites désillusions sans intérêt. Elle ne vivait que pour elle, s’estimant vraiment maudite par les cieux. Qu’avait-elle fait pour mériter cela ? Et puis, il suffisait qu’elle allume la radio, qu’elle se laisse bercée par une vieille mélodie pour que les larmes ruissèlent le long de ses joues. Pour que, le visage souillé, elle se rende compte de tout ce qu’elle possédait et toutes ces histoires qu’elle inventait sans raison. Pourquoi vouloir prétendre être malade ? Pourquoi dire que son cœur n’allait pas bien, qu’elle mourrait plus tôt qu’elle ne le souhaitait ? Dans le fond, elle n’en savait rien. Elle n’en n’avait pas la moindre idée. Peut-être qu’elle n’allait pas aussi bien qu’elle voulait bien le laisser croire. Peut-être qu’elle avait besoin de quelqu’un à qui parler. Mais des vrais paroles cette fois, avec du sens, des sentiments et non des âneries à débitées plus vite que son ombre. Et il lui arrivait de penser que cette personne pourrait être Tadeck. Elle avait l’impression qu’il pourrait être cette autre personne dont elle avait tant besoin. Parce qu’il était différent d’elle. Parce qu’il y avait un étrange néant dans ces prunelles. Aucune étoile, aucune lueur d’espoir. Elle l’avait souvent cherché, guetté la moindre de ses réactions, mais cela avait été vain. Rien. Pas de sourire et peu de réel intérêt. Tadeck était un personnage étrange et trouble. Plus elle avait cherché à le comprendre, plus elle avait cherché à percer les mystères qui l’entouraient, moins elle l’avait cerné. Souvent, lorsqu’elle posait le regard sur lui, c’était pour déceler une lueur d’humanité. Quelque chose qui ferait de lui un homme que les autres, simplement différent. Mais non, plus elle fixait ces prunelles sur lui et moins il lui sembla qu’il était humain. Il n’avait rien d’un ange, non plus, ceci dit. Elle avait l’impression qu’il n’avait rien de particulièrement bon à lui apporter. Qu’il n’avait, de toute façon, aucune envie de le faire. Pourtant, elle s’était accrochée à lui comme une huître s’accroche à une roche. Avec la force du désespoir, avec la force des enfants qui ont peur. Parce qu’elle avait peur, tellement peur. Elle se sentait comme trop fragile dans un monde trop imposant pour elle. Et lui, cet autre, si différent à elle mais si parfait à la fois… Elle avait beau cherché pourquoi et comment c’était arrivé, il lui sembla qu’aucune véritable réponse n’était requise. C’était arrivé un beau jour, peut-être même dès le premier regard. Peut-être qu’elle avait vu en lui plus que ce qu’il voulait bien montrer. Peut-être qu’elle s’était persuadé en vain qu’elle pourrait le sauver de lui-même et de cette manière étrange qu’il avait de se voir. Peut-être avait-elle cru qu’avec elle à ses côtés, il irait mieux. Faux, illusion joliment façonné pour sa trop grande imagination. Pourquoi c’était arrivé ? Comme ça, juste comme ça. On ne choisit pas de qui l’on tombe amoureux, ni de qui on aime et encore moins de la façon dont ça se produit. Elle aurait très bien l’apprécier, voir en lui l’ami idéal. S’accoutumer à ses silences, respecter ce qu’il était. Mais ce qu’elle ressentait… Ces sentiments si puissants… Ils l’interdisaient de demeuré indifférente, ils l’obligeaient à le repousser dans ces retranchements. Elle voulait l’éveiller au monde, l’éveille à la vie. Celle que l’on partage avec les autres sans avoir la crainte des les dérangés. Mais une fois de plus, elle avait la preuve que sa manière de procéder était tout sauf acceptable, que, bien au contraire, elle ne faisait qu’envenimer les choses. Elle s’y prenait mal avec lui, tellement mal que son cœur s’en sentait troublé et menacé. Le regard qu’il posait sur elle et son désintérêt plus qu’évident lui glaçait le sang, il la rendait chèvre. Comment était-ce possible ? La rage était montée crescendo, d’abord, c’était un léger sentiment d’abattement qui lui avait encerclé le cœur. Elle avait abandonné, baissé les bras, oublié de le faire réagir. Comme un chien bien dressé, elle avait lui cherché une bouteille d’eau, sans trop se préoccupé du chaos infernal qui balayait l’intérieur de son être. Mais lorsque ses doigts encerclèrent le plastique contenant le liquide, une larme sillonna le long de sa joue. Rageusement, elle l’avait essuyé d’un revers de poignet. Pourquoi le prendre à cœur ? Elle avait parfaitement conscience qu’il avait toujours été comme cela et qu’il ne changerait probablement jamais. Elle savait qu’il agissait de cette manière avec tout le monde. Alors, dans le fond, peut-être que c’était cela qui la blessait et la dérangeait. Iseult n’avait pas la prétention de se croire mieux que quiconque. Mais elle avait toujours eu la sensation qu’ils partageaient quelque chose. Qu’au travers de ces silences, Tadeck l’appréciait. Tadeck était son âme sœur, complètement différente à la sienne et donc, capable de la rendre entière. Pourtant, au vu de ses réactions, requêtes et autres moments de vivacités (plus que rares), elle avait l’impression de n’être rien. Même pas une amie, même pas une connaissance. Rien. Comme un déchet abandonné sur le trottoir, comme une poussière dans l’œil. Tellement dérangeante, si pas insignifiante. Incapable de le supporter, elle avait perdu les pédales. Oubliant la douceur qu’elle essayait d’appliquer avec lui en règle générale. Ça ne marchait pas de toute façon, alors, peut-être que la colère l’aiderait. Mais à peine avait-elle balancé cette bouteille à son visage qu’elle le regrettait déjà. Jamais elle n’aurait du faire ça, jamais. Mais trop tard, la machine était enclenchée et les mots se déversaient de ses lèvres avec une haine incontrôlable. Elle refusait de lui accorder satisfaction s’il n’était lui-même pas capable de lui rendre la pareille. Iseult le détestait. Elle le détestait de faire d’elle quelqu’un de fragile, d’écorché-vif, d’impossible à raisonné. Une véritable tornade, une furie. Elle le détestait à mesure qu’il la rendait amoureuse de lui. Il ne faisait rien pourtant, il n’était que lui-même. Mais bon sang, ce que ce sentiment étouffant grandissait vite au cœur de ses tripes. Des milliers de papillons au creux de l’estomac, des décharges électriques dans le cœur et l’esprit occupé par ses traits. Tadeck. Ta-deck. Deux syllabes, deux foutues syllabes qui tournaient en boucle, comme une vieille mélodie raille. Fais ton travail à la con, casse-toi, se répétait-elle intérieurement. Espérant qu’il entende sa requête au plus profond de lui-même, plus que le simple écho de sa voix brisée dans l’air. « D’accord. » Un mot. Un simple mot. Celui de trop. Elle avait espérer une réaction de sa part, un tout petit quelque chose. Peut-être pas des cris, peut-être pas un torrent de paroles mais… Quelque chose. Hors cet accord était pareil à un silence et elle n’en pouvait plus. Trop de calme finirait par l’achever. Si bien que la haine se déversa dans tous son être. Ses bras devenus si lourd s’abattirent sur son torse sans ménagement. Réagis bon sang, réveille-toi, explique-moi. Iseult voulait vraiment le comprendre. C’était devenu maladif. Sans lui, elle s’ennuyait mais avec lui, elle était dépassée. Elle remarqua à peine qu’il s’était légèrement écarté et que peu à peu la nervosité l’avait gagné. De toute façon, Iseult était fatiguée. Epuisée. Elle voulait retrouver les battements paisibles de son cœur, elle voulait retrouver le calme. Et peut-être la raison. Se trouvait-elle au coin de la rue à l’attendre ? Si c’était le cas, elle aurait tôt fait de rentrer à la maison, bien gentiment, avant que la demoiselle ne saccage tout… Mais comme toujours, la pression était retombée d’elle-même et Iseult s’était écroulé sur le sol. Arrachant l’herbe avec détermination mais lassitude. Pourquoi ? Pourquoi Tadeck ne voulait-il pas lui faire ce tout petit plaisir ? Ou du moins, ne pas l’ignorer aussi superbement ? Elle voulait qu’il parte, désormais, c’était le seul souhait qu’elle avait. Elle ne pouvait plus endurer sa présence sans que la colère ne l’étreigne et lui lacère les entrailles. Elle ne pouvait plus observer son visage si dur et pourtant si… adorable. Pourquoi donc se faisait-elle toujours avoir par des jolis minois ? POURQUOI ? Qu’il s’en aille… « Non. Je n'aime pas les mensonges. Je ne partirais pas tant que je n'aurais pas fait mon travail. » Pensait-il qu’elle lui laissait le choix ? Il n’aimait pas les mensonges ? Mais tout ici avait des allures de facéties, de choses irréelles façonnées par envie. Il croyait quoi, hein ? Le monde entier est un mensonge. C’est comme ça que ça marche, peut-être aurait-il du grandir ! Peut-être aurait-il du arrêter de croire que tout peut toujours se passer avec simplicité dans ce monde. Elle non plus n’aimait pas les mensonges, mais parfois, il fallait être obligé d’en user. Parce que les autres nous forcent à le faire, parce que leurs attitudes sont dérangeantes et qu’on ne sait pas comment le dire. Parce que c’est comme ça, tout simplement. Mais il semblait oublier une chose. C’était elle la maitresse de maison. Si elle disait « Tadeck, tu te casses. » Il devait s’en aller. Il n’avait rien à dire. Elle allait d’ailleurs ouvrir la bouche pour lui faire remarquer que peu importe ses valeurs ou ses envies, elle ferait ce que bon lui semblait. Mais en le voyant observer la bouteille sans y toucher, elle ne parvint qu’à rester muette. Que pouvait-elle dire, de toute façon ? Mais elle fit bien de demeurer silencieuse. Parce que l’impossible se produisit. Parce que ce qu’elle avait toujours rêvé de voir se produire arriva. Tadeck ouvrit la bouche et des tas de mots en sortirent. Des tas de mots. A la simple entente de sa voix, elle courba l’échine et frissonna de tout son être. Parfois, elle avait tendance à oublier combien tout en lui, lui plaisait. Comme sa voix. Cette voix qu’elle enregistrait mentalement, qu’elle repasserait comme un disque une fois la nuit venue. Ce soir, oui, lorsqu’elle fermerait les yeux, elle verrait Tadeck lui parler. Même si… « Je ne suis pas égoïste. Je fais ce que je peux. Je ne suis pas quelqu'un de bien et tu ne dois pas m'apprécier. Je ne suis pas quelqu'un de bien, je fais du mal. Si un bonjour de ma part peut t'éviter de te mettre dans cet état, je te dirais bonjour. Pas plus. Tu dois arrêter de penser. Je n'ai jamais dit que ta présence m'était désagréable. Je n'ai jamais dit que tu n'étais rien. Ne pas parler ne veut pas dire ignorer. Tu parles trop, je le respecte. Je ne parle pas, respecte-le à ton tour. Il ne faut jamais me toucher. Jamais. Ne recommence plus. N'oublie pas : je ne suis pas quelqu'un de bien. Et il est certain que, plus tu seras loin de moi, plus tu seras heureuse. Je vais retourner travailler et je vais faire vite. Dorénavant, tu demanderas à tes parents de ne plus s'organiser comme ça. Les contraintes ne te réussissent pas visiblement. » Ses mots la blessèrent. Comme un coup reçu sur la tête, comme si les stigmates du Christ lui apparaissaient sur le corps sans raison. Et sans qu’elle n’y puisse rien faire, une larme ruissela à nouveau le long de sa joue. Mais cette fois, ce ne fut pas la seule. Une seconde sillonna le long sa joue, puis une autre et encore une autre… Jusqu’à être baignée de larmes et avoir une sensation horrible d’étouffement.

Elle allait se noyer. Dans ses propres larmes. Elle allait mourir noyer, les poumons emplit d’eau salée. Chaque phrase de Tadeck tournait en boucle dans sa tête, la forçant à les analyser de fond en comble. "Je ne suis pas égoïste. Je fais ce que je peux." C’est vrai qu’elle avait peut-être exagéré en hurlant à plusieurs reprises qui ne pensait qu’à lui et qu’il n’était rien de plus qu’un salopard d’égoïste. Mais sur le moment, c’était ce qu’elle avait ressenti et fidèle à elle-même, Iseult avait tout lâché. Mais cette simple phrase la faisait culpabiliser. Elle avait honte d’avoir été si brutale et violente. Elle savait qu’il n’était pas vraiment égoïste et qu’il ne la blessait pas toujours volontairement. "Je ne suis pas quelqu’un de bien et te ne dois pas m’apprécier." Celle-là, elle se refusait de l’encaisser. Premièrement, elle était certaine qu’il était quelqu’un de bien. S’il ne l’était pas, il ne lui aurait pas dit cela. Quoi qu’il puisse dire ou faire pour lui faire croire le contraire serait vain. Iseult savait que Tadeck était une bonne personne à sa façon. Et pire, elle ne pouvait QUE l’apprécier. C’était un peu de sa faute si elle s’était accroché à lui, il ne pouvait pas désormais tout changé son prétexte que monsieur se pensait super vilain. Non, ça n’avait pas de sens pour elle et plus vite il se mettrait ça dans le crâne, et moins de temps serait perdu. Ils gaspillaient leur énergie à dire à l’autre comme agir et quoi croire, c’était ridicule et insensé comme comportement. Peut-être était-ce cette phrase plus que les autres qui lui avait déchiré le cœur. Qu’il puisse croire qu’il soit simple de ne pas l’apprécier. Pour une raison sans fondement et irréelle à ses yeux. "Je ne suis pas quelqu’un de bien, je fais du mal." Comme tout le monde, ne put-elle s’empêcher de penser. De ce point de vue, il n’était pas différent de quiconque. Mais pourquoi donc pensait-il être un monstre ? Iseult ignorait beaucoup de choses sur la vie de Tadeck, toutes ces choses qui auraient pu être pu l’aider à comprendre. Mais elle ne les saurait, pas vrai ? Jamais, il ne lui dirait, elle le savait. Pourtant, elle en mourait d’envie. Elle aurait tout donné pour qu’il lui parle de lui. Qu’il l’enserre de ses bras et qu’ils échangent leurs histoires… Quel beau rêve qu’elle voyait partir en fumé avec une nouvelle phrase : "Tu parles trop, je le respecte. Je ne parle pas, respecte-le à ton tour." Iseult prit cette phrase comme un reproche. Bien sûr, elle parlait trop. Normal. Logique. Evident. Elle était ainsi depuis toujours et elle le regrettait souvent… Mais s’il lui en laissant le temps et s’il l’aidait, elle était persuadé de pouvoir faire un travail sur elle-même pour calmer ses flots de paroles insensées. Lorsque l’on veut changer et que quelqu’un est là pour nous soutenir, on peut le faire. Elle le savait, elle l’avait déjà vu faire. Et si elle pouvait apprendre à rester muette, il pouvait apprendre à parler. Ce n’était pas impossible. Mais visiblement, il prenait ses quelques moments de rébellion pour un manque de respect et cela la chagrina. Elle ne lui manquait pas de respect, elle l’aimait déjà bien trop pour ça. Comment pouvait-il ne serait-ce que le penser ? Et il avait enchainé sur le fait de ne pas le doucher. Là encore Iseult ne comprenait rien. Absolument rien. Mais elle notait cette information dans un coin de son esprit. Non, elle ne le toucherait plus… Elle ne se le promit cependant pas, il lui sembla que c’étai parfaitement impossible. Toucher quelqu’un, ça voulait dire tellement à ses yeux… "N'oublie pas : je ne suis pas quelqu'un de bien. Et il est certain que, plus tu seras loin de moi, plus tu seras heureuse." NON, aurait-elle aimé hurlé. Elle voulait lui dire qu’il racontait n’importe quoi, que tout cela n’était que des mensonges, que c’était ridicule, que finalement elle le préférait muet. Tadeck avait une vision des choses si différente de la sienne que la donzelle ne savait comment l’interpréter. SI, c’était quelqu’un de bien. Et NON, plus elle serait loin de lui, moins elle irait bien. N’avait-il pas compris ? Ne voyait-il pas que la souffrance dans ses yeux, que les larmes… tout ça était justement causé par cette affreuse distance qu’il instaurait entre eux ? La suite de ses paroles lui échappa un peu, et tant mieux pour elle. Sans doute n’aurait-elle pas apprécié sa dernière recommandation. Mais lorsque la bouteille retomba à ses côtés, elle redescendit sur Terre, retrouvant le fil de la réalité. Il lui sembla que les dernières minutes n’avaient jamais été qu’un film qu’elle s’était fait, une trame imaginaire joliment modelée. Mais cette bouteille, c’était comme une ancre jeté en pleine mer. Cela lui permettrait d’arrêter la noyade et les suffocations. Les larmes arrêtent de couler bien que ses yeux demeurèrent brillants et sa respiration peina à retrouva un rythme régulier, mais essayait malgré tout. Le monde se mettait de nouveau en route, et comme une machine infernale, il allait tourner et tourner et tourner… jusqu’à la fin des temps. Iseult releva alors les yeux et porta son attention sur la silhouette de celui qu’elle adorait en secret. Observant son dos avec attention. Observant ses gestions avec un calme olympien. Comme si rien ne s’était passé, comme si tout avait été oublié… mais non, tout était toujours encré dans son esprit et même avec tous les efforts du monde, jamais elle n’oublierait. Les mots qu’ils avaient dit s’était incrusté en lettre d’or sur les quatre coins de sa mémoire, il tournerait comme une litanie sans fin. Ce serait, dorénavant, sa musique favorite.

Iseult tendit le bras et s’empara de la petite bouteille d’eau. Ses doigts encerclèrent le cylindre et elle vint porter l’objet à ses yeux. Les ondulations du liquide furent comme une révélation. À son tour, il lui avait suffit de regarder au tréfonds de ce mirage pour trouver les mots et les attitudes à avoir. Elle serra le poing, déforma légèrement le plastique, mais ne le lâcha pas pour autant. Péniblement, avec une certaine appréhension, elle se remit debout. Et d’un pas lent, elle contourna les ouvrages de Tadeck pour se poser juste devant lui. Dans un pseudo geste théâtrale, elle lança la bouteille à ses pieds, pour être bien sûr qu’il soit obligé de s’arrêter pour ramasser l’objet. Et d’une voix douce, bien qu’encore emplie de sanglot elle déclara : « Je pensais que tu avais soif… » Après tout, il l’avait dit lui-même et pourtant, il n’avait pas bu une seule gorgée d’eau. Pour lui, parler avait du être une corvée et s’il avait eu vraiment soif, après son petit speech, il aurait du vider la bouteille. Hors, ce n’était pas le cas. Et bien que cette fois Iseult refuse de se faire de faux espoirs, elle y lisait sans doute plus de chose qu’elle n’aurait du. Imaginant peut-être que le petit pas qu’il avait fait vers elle était… elle n’en savait trop rien à vrai dire, et elle s’en moquait un peu à cet instant. Mais fidèle à elle-même, elle n’épargnerait pas à Tadeck ses monologues habituelles. « Tu n’est pas quelqu’un de bien, c’est ça ? C’est ce que tu crois ? Et bien Tadeck Je-ne-connais-pas-ton-deuxième-prénom Nosborn, laisse-moi te dire que tu te fourvoies et que ta définition du mot "bien" est foutrement à revoir. » Déjà là, elle regrettait d’avoir commis une faute imparable : avoué qu’elle ignorait beaucoup de chose sur lui. Comme son deuxième prénom, sa couleur préférée, s’il avait eu des animaux de compagnie étant petit… Ce genre de petits détails futiles qu’elle aurait adoré savoir, qu’elle aurait chéri sans raison. Pour leur valeur sentimentale. « Non seulement tu es quelqu’un de bien, mais en plus, m’écarter de toi serait la pire chose que je puisse faire. Tu ne comprends donc pas ? » Susurra-t-elle, les yeux s’embuant à nouveaux de larmes. « C’est la distance qui me mets dans cet état… C’est t’avoir là, juste à porté de main et… ne pas pouvoir te toucher. Pourquoi ne pourrais-je pas te toucher, Tadeck ? Pourquoi ? Parce qu’à tes yeux tu n’es pas quelqu’un de bien ? Et bien je ne sais pas qui t’as mis cette idée en tête, mais c’est de la foutaise. Ce n’est pas vrai, Tadeck… Et ne crois pas que je te manque de respect lorsque je te demande de parler, ce n’est pas ça. J’ai juste besoin d’entendre ta voix. C’est un besoin, est-ce que tu comprends ? » Pouvait-il seulement comprendre ce qu’elle ressentait ? Pouvait-il seulement le deviner ou l’imaginer ? Non, bien sûr que non. « Et je sais que tu n’es pas égoïste, je le vois que tu fais ce que tu peux et… Je suis désolée, pour ça. Je ne voulais pas. J’essaye aussi de faire ce que je peux, mais je ne suis pas comme toi, Tadeck. J’ai besoin de parler, j’ai besoin de toucher, j’ai besoin de voir que je compte. Et je… » Iseult s’interrompit et avec une spontanéité qu’elle ne put garder pour elle, elle s’approcha à grande foulée, piétinant son travail sans honte. Ses deux mains s’agrippèrent à ses joues, tant pis pour la promesse qu’elle ne s’était pas faites ou tant pis s’il la repousserait, et elle vint glisser ses lèvres sur les siennes. Avec une douceur infinie, elle caressait ses lèvres des siennes durant une fraction de secondes. Et puis, elle se recula vivement, retourna quelques mètres plus loin, là où elle se trouvait avant de venir l’embrasser. Elle croisa ses bras sur sa poitrine et baissa les yeux, honteuses de ne pas avoir pu retenir cet élan d’attention. « Tu es quelqu’un de bien. Et j’ai besoin de toi dans ma vie pour être heureuse. Parce que même si tu ne le vois pas, je tombe amoureuse de toi à chaque seconde. Quand je me dis qu’on n’arrivera jamais à rien toi et moi, que ça ne vaut pas le coup… ta simple présence suffit à me dissuader. J’ai besoin de toi. Mais si tu me dis que tu ne veux plus que l’on se croise ou même si tu me le montres – vu que les mots c’est pas ton fort – et bien je l’accepterai et je vivrai avec. Parce que tu l’auras voulu et que je l’aurai compris. Hors là, je n’ai jamais cessé d’espérer et tu ne m’as jamais rien fait comprendre… Alors, dis-moi, Tadeck… Est-ce qu’on va s’oublier ? Rangé cette histoire dans un dossier affaire classé ? Parce que si c’est le cas, j’ai une dernière chose à dire… » Mais les mots étaient trop dur pour qu’elle continue. Allait-elle abandonné son Je t’aime avant de savoir ce qui allait se passer ? Non. Jamais. Pas comme ça…
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Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT Empty
MessageSujet: Re: Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT   Lorsqu'on est différent, il est indéniable que l'on soit seul. ISEULT EmptyVen 20 Avr - 21:03




Je ne saurais expliquer comment tous ces mots étaient venu à franchir mes lèvres. Je ne savais même pas que j'en étais capable. J'avais parlé sans réfléchir, comme ça. J'avais juste dit ce qu'il me passait à l'esprit, la vérité, mon ressentit. Je n'étais même pas sûr que mes paroles avaient un sens. J'avais de toute façon toujours considéré la parole comme inutile. Si l'on prenait le temps de se poser un peu et d'observer son entourage, on réalisait que notre corps tout entier parlait pour nous. Je chérissais le silence plus que tout au monde. Alors... Alors comment était-il possible que je sois bercé par l'incessante voix d'Iseult ? Elle représentait exactement ce que je rejetais depuis toujours. Parler, parler en vain, parler encore... Et pourtant, je ne me lassais jamais de l'écouter. Comme une douce musique qui se baladait en moi, me ressourçant et m'apaisant. L'écouter en boucle, la chérir, la garder pour moi. Cette musique, cette voix. J'aurais voulu la capturer, l'emprisonner et la garder avec moi. J'aurais voulu m'allonger sur mon lit et l'entendre. L'entendre et sourire, insouciant de tout le reste, oubliant qu'un monde s'agitait autour de moi. Je voulais me taire à jamais pour qu'elle puisse parler sans fin. Que plus aucun silence ne vienne m'envelopper. Pourquoi ? Je ne cessais de me répéter cette question. Pourquoi cette voix me faisait-elle cet effet ? Est-ce que cela venait du timbre de voix ... ou de la personne qui parlait ? Bon sang, je ne savais pas ! Je ne comprenais rien. Mais une chose était désormais certaine : je n'étais pas fait pour parler. A peine eu-je terminé que la douce enfant se mit à pleurer. D'abord si doucement et puis, de violents sanglots, qui m'éreintait le cœur à chaque soupire. J'étais presque étonné. Je ressentais des choses, moi ? C'était absurde, fou, irréel ! Ça ne devait pas arriver. Jamais. Je n'en étais pas capable, je n'en avais pas envie. Ce n'était pas moi, tout simplement.

Alors je te regarde pleurer Iseult, et mon cœur pleure avec toi. Mais tu ne le sais pas. Tu ne peux pas le savoir, je te regarde comme on regard le paysage défiler en voiture. Tu ne sauras jamais. Je ne sais pas si c'est triste ou pas, si c'est bien ou mal. Si c'est une bonne chose pour toi, ou au contraire. Je ne sais rien, je n'ai jamais rien su. On m'a déjà parlé de l'amour. On m'a déjà expliqué certaines choses. Mais tout est si abstrait. Comme cette peinture qui vous transporte mais que vous ne comprenez pas. C'est flou, ça n'a pas de sens, ça ne représente rien. Mais on reste des heures devant, fasciné. Mon cœur pleure si fort Iseult. Ne l'entends-tu pas ? Je voudrais tant que tu me donnes tes étoiles, tes rêves et tes espoirs. Que tu me confies ton innocence, ton optimisme et ta folie. Je voudrais te promettre que j'en prendrais grand soin, que l'on partagerait tout ça désormais. Mais tu sais.. tu sais bien que tout se consumerait. Que je détruirais tout et toi avec. Tu sais que je te repousse pour te protéger. Le sais-tu seulement ? Sais-tu que je pense à toi souvent ? Sais-tu que j'ose deviner parfois la délicatesse de ta peau ? Un effleurement, un regard tendre. Tout en toi m'inspire poésie et légèreté. Te regarder pendant des heures me semble être la plus noble des distractions. Sais-tu que je te trouve belle en toutes circonstances ? Parce que, même si ta candeur est captivante, je ne vois en toi que la beauté de tes sentiments, de ton être. Tu es belle même lorsque je ne te vois pas. Sais-tu que ma main tremble parfois en ta présence ? Cachée à l'ombre de mes gants de travail, elle tremble en te devinant endormie, si paisible.

Iseult, sais-tu seulement que mon cœur pleure ?



La bouteille tomba au sol et Tadeck s'éloigna, sans même un dernier regard, indifférent à la jeune femme. Il reprit son travail, ignorant le fait qu'elle voulait qu'il s'en aille. Non, il ne partira pas. Tadeck ne fuyait pas. Pas comme ça en tout cas. Il allait terminer ce qu'il avait commencé et il s'en irait, sans larmes et sans cris. Un "au revoir" simple et poli avant de refermer la porte derrière lui et de regagner son domicile. Il avait une vision si simpliste, si facile des choses... Tadeck ne parvenait pas à comprendre que le monde autour de lui ne fonctionnait pas comme ça. Qu'il était cet ovni débarqué de nul part, entouré de mystères captivants. Tadeck réduisait toutes les choses à leur simple condition. Une lampe était une lampe. Un mot n'était qu'un mot. Les sous-entendus, les métaphores, il ne comprenait pas. Il ne voyait pas l'intérêt. Il ne cherchait jamais bien loin. Non pas qu'il n'avait pas la finesse d'esprit pour, bien au contraire. Mais simplement qu'il ne pouvait pas fonctionner comme ça. Il avait besoin de se préserver, de ne plus vivre aucun malheur, de n'être le monstre de plus personne. Alors pour ça, il s'était bâtit un monde dont lui seul avait connaissance. Et son monde ne pouvait cohabiter avec celui des autres. On ne le comprenait pas, on le prenait pour un original, un asocial. Il ne l'était pas. Il voulait juste anesthésier son corps, ne plus jamais rien ressentir. Vivre platement, sans haut et sans bas. Juste vivre. Attendre paisiblement son heure, sans crainte, sans regret. Juste attendre. Mais Iseult refusait tout ça. Elle cherchait sans cesse à percer sa bulle, à vouloir s'y glisser avec lui. Et il luttait, il luttait tellement pour l'en empêcher, pour la décourager. Il luttait en étant "lui-même". Il luttait en s'enfermant dans ses silences, en retirant à son regard la moindre étincelle de vie. Un corps, pas d'âme. Juste lui, juste.. Tadeck.

Je n'ai connu que la souffrance. Je t'en prie, laisse-moi tout tuer à l'intérieur de moi.
Laisse-moi t'ignorer. Je t'en prie, je ne veux pas t'aimer.

Ses pleurs s'étaient enfin terminés, le silence reprenait ses droits. Mais cet instant de répit fut rapidement interrompu. Elle s'était levée et s'approchait de lui. Encore. Imperturbable, Tadeck continuait son travail, accroupis. Lorsque la bouteille tomba devant lui, il s'arrêta, fixant l'objet. « Je pensais que tu avais soif… » Il resta un long moment dans cette position, le regard rivé sur cette bouteille, réalisant doucement son erreur. Il finit par relâcher ses outils, attrapant lentement la bouteille et se redressa, faisant face à Iseult. Il resta muet. Il savait qu'elle ne s'arrêterait pas là, qu'elle allait parler. Elle parlait tout le temps. Pour tout et pour rien. Alors il fit ce qu'il savait faire de mieux : se taire. Et attendre qu'elle se décide. « Tu n’est pas quelqu’un de bien, c’est ça ? C’est ce que tu crois ? Et bien Tadeck Je-ne-connais-pas-ton-deuxième-prénom Nosborn, laisse-moi te dire que tu te fourvoies et que ta définition du mot "bien" est foutrement à revoir. » Et d'un calme olympien, il répondit à la seule partie de la phrase qui ne demandait aucune réponse. « Jaad. » Elle sembla surprise, comme si elle ne saisissait pas où il voulait en venir. Il reprit : « Je m'appelle Tadeck Jaad Nosborn. » Est-ce que ça l'intéressait vraiment ? Il en doutait. Il était persuadé qu'elle s'en fichait. Personne ne s'intéressait aux autres, excepté pour leur faire du mal. Et il parait que dans ce domaine, c'était lui le meilleur. En tout cas, c'était ce que lui avait dit sa mère. Et une mère a toujours raison, n'est-ce pas ? C'était ce que la société lui avait toujours répété en tout cas. Alors elle avait eut raison pour tout. Raison de le haïr. Raison de l'abandonner. Raison de le faire dormir sur un canapé trop petit pour lui. Raison de ne pas lui faire à manger. Raison de lui cracher sa haine au quotidien. Raison de lui rappeler qu'il était comme son père et qu'un jour lui aussi commettrait l'irréparable. Lui aussi deviendrait une ordure, un monstre. Ce monstre dont on lui avait toujours parlé. Ce monstre qu'il croyait éperdument être. Ce monstre qu'il tentait de dompter afin de protéger tous ceux qui osaient s'aventurer trop près de lui. Protéger Iseult, voilà tout ce qui importait. La véritable noblesse des sentiments c'était bien ça. Choisir la haine de ceux qu'on aime pour les protéger de nous. Le sacrifice, l'abandon. Si seulement il savait. Si seulement. « Non seulement tu es quelqu’un de bien, mais en plus, m’écarter de toi serait la pire chose que je puisse faire. Tu ne comprends donc pas ? C’est la distance qui me mets dans cet état… C’est t’avoir là, juste à porté de main et… ne pas pouvoir te toucher. Pourquoi ne pourrais-je pas te toucher, Tadeck ? Pourquoi ? Parce qu’à tes yeux tu n’es pas quelqu’un de bien ? Et bien je ne sais pas qui t’as mis cette idée en tête, mais c’est de la foutaise. Ce n’est pas vrai, Tadeck… Et ne crois pas que je te manque de respect lorsque je te demande de parler, ce n’est pas ça. J’ai juste besoin d’entendre ta voix. C’est un besoin, est-ce que tu comprends ? » Mais Tadeck ne fléchirait pas, qu'importe ces paroles.


Pardonne-moi. Pardonne-moi pour tout le mal que je vais te faire. Pour toutes ces choses que je vais dire. Tu ne sauras jamais que cette douleur là t'aura épargnée d'une bien pire. Tu n'as pas idée. Je sais que tu crois de toutes tes forces en tes paroles, mais tu ne sais pas. Tu ne sais rien. Je t'en supplie, pardonne-moi si je te blesse. Comprend que je fais tout ça pour te protéger. S'il te plait, comprend-le Iseult. Ma fragile Iseult...


« Un besoin ? Serais-tu égoïste Iseult ? » Tadeck n'avait retenu que ce qu'il avait bien voulu entendre. Se protégeant d'une douleur lancinante, refusant de perdre pied et de tomber face à elle, il restait si froid. Si distant. Se refusant de parler sérieusement. De parler sentiments et émotions. Refusant toutes choses propres à l'humain. « Toi qui ne connais rien de moi.. Comment peux-tu savoir quel genre de personne je suis Iseult ? Tu n'es qu'une enfant. » Sa voix était calme, absolument pas agressive. Il parlait avec la même délicatesse que d'ordinaire. Impassible, sans jamais hausser la voix. Du premier au dernier mot, sa voix n'était ni montée ni descendue d'un ton. Tout en lui n'était que continuité et similitude. « Et je sais que tu n’es pas égoïste, je le vois que tu fais ce que tu peux et… Je suis désolée, pour ça. Je ne voulais pas. J’essaye aussi de faire ce que je peux, mais je ne suis pas comme toi, Tadeck. J’ai besoin de parler, j’ai besoin de toucher, j’ai besoin de voir que je compte. Et je… » Non en effet, elle n'était pas comme lui. Un monde tout entier les séparait. Ils étaient les opposés et les contraires à la fois. Ils étaient tout et rien. Ils étaient la jungle et le néant. Ils étaient si insignifiants aux yeux du monde, et la plus belle chose aux yeux de l'autre. Mais ils étaient trop différents. Malgré l'attraction, malgré l'impression de compatibilité, malgré tout ça, ils étaient trop différents. Rien ne survit au néant. Il dévastait tout, détruisait tout. Après son passage, il n'y avait plus rien. C'était la définition même du mot néant. Le vide, le rien. Et Tadeck ne voulait pas, jamais, qu'Iseult finisse comme lui. Mais alors qu'il songeait en silence, la belle enfant une fois de plus fit preuve de trop d'impulsivité. Franchissant toutes les barrières qui entouraient Tadeck, elle se jeta contre lui, s'emparant de ses lèvres, insolente, courageuse.


Tout s'écroulait autour de moi. Le sol se retirait sous mes pieds, l'appréhension me gagnait face au fait de tomber. Mais je n'en faisais rien, retenu par tes mains sur mes joues. Mes yeux étaient grands ouverts, pourtant je ne voyais rien. Tu me fais mal, tellement mal. Et pourtant, c'est si doux. La colère me consume. La surprise m'immobilise. Que fais-tu Iseult ? Folle enfant... Ne sais-tu pas que de nous deux, c'est toi qui a le plus mal en réalité ? Ne vois-tu pas toute la souffrance que tu t'imposes ? N'as-tu pas comprit que je ne peux pas changer ? Tes lèvres me brûlent et c'est insupportable. Je t'en prie, n'arrête pas. Tes mains m'écorchent et je me sens flancher. Je t'en prie, continue. Prend mon cœur, arrache-le, piétine-le. Malmène-moi plus que jamais. Venge toi de ce que je te fais subir. Aime-moi si fort que tu ne pourras plus que me détester. Prend mon âme, jette-là dans le vide et rit. Je t'en prie, ne t'arrête jamais de rire. Mais s'il te plait, lâche-moi. Libère-moi. Il ne reste déjà plus rien de moi, c'est trop tard je crois. Tes lèvres m'asphyxient. Etouffe-moi. Tes mains m'écrasent. Détruis-moi. Jette-moi, je ne suis bon à rien. Cesse. Je t'en supplie, cesse. Je suis trop faible pour supporter cette explosion dans ma poitrine. Cette violente douleur qui me terrasse de la tête aux pieds. Repousse-moi avant que je ne le fasse. Ne comprends-tu pas ? Je ne peux pas t'aimer.


Tétanisé, Tadeck s'était figé, les yeux écarquillés. Qu'avait-elle fait ? Comment avait-elle osé ? Elle se retira et Tadeck exprima quelque chose pour la première fois. De la douleur. Les lèvres entrouvertes, la mine décomposée, il avait si mal. Il ferma la bouche et les yeux en même temps, inspirant bruyamment. Il déglutit et rouvrit les yeux, la regardant avec déception. Pourquoi avait-elle fait ça ? Elle ne comprenait pas combien ça lui faisait mal ? Son regard s'échappa du sien et glissa dans le vide, s'immobilisant vers le sol. Sa gorge c'était nouée et la boule qui s'était formée en plein milieu était si douloureuse. Et son estomac qui se retournait... Tout semblait dysfonctionner en lui. Comme une machine qu'on aurait détraqué volontairement. Il recula d'un pas alors qu'Iseult faisait de même, visiblement peu fière d'elle. Un voile de tristesse se posa sur les prunelles sombres du garçon. Il ne pouvait plus lui faire face. Il ne pouvait plus la regarder. Elle avait pénétré son intimité, beaucoup trop. Elle s'était imposée à lui si fort, qu'elle avait brisé tout ce qu'elle avait réussit à construire à force de patience et de douceur. Elle l'avait violenté et maintenant il courrait se retrancher, bien décidé à ne plus jamais ressortir de là. Enfermé en lui-même, prisonnier de son âme, de son corps. Il était son propre bourreau et ne s'en rendait même pas compte. Il recula encore d'un pas alors que le goût des lèvres d'Iseult sur les siennes allait le hanter à jamais et agiter ses nuits. « Tu es quelqu’un de bien. Et j’ai besoin de toi dans ma vie pour être heureuse. Parce que même si tu ne le vois pas, je tombe amoureuse de toi à chaque seconde. Quand je me dis qu’on n’arrivera jamais à rien toi et moi, que ça ne vaut pas le coup… ta simple présence suffit à me dissuader. J’ai besoin de toi. Mais si tu me dis que tu ne veux plus que l’on se croise ou même si tu me le montres – vu que les mots c’est pas ton fort – et bien je l’accepterai et je vivrai avec. Parce que tu l’auras voulu et que je l’aurai compris. Hors là, je n’ai jamais cessé d’espérer et tu ne m’as jamais rien fait comprendre… Alors, dis-moi, Tadeck… Est-ce qu’on va s’oublier ? Rangé cette histoire dans un dossier affaire classé ? Parce que si c’est le cas, j’ai une dernière chose à dire… »

TAIS-TOI ! Ne dis plus rien ! Tais-toi car tu ne me laisse plus le choix maintenant.
C'était si bien quand tu parlais pour un rien, si bien...

L'expression de Tadeck changea à nouveau, pour revenir à l'habituelle. Neutre. Et là, d'une voix malgré tout plus sèche que d'ordinaire, il répondit : « Moi, je n'ai pas besoin de toi. » Bien sûr qu'il mentait. Mais il était convaincu que c'était ce qu'il fallait dire. Ce qu'il fallait faire. Il lui tourna brusquement le dos et ramassa toutes les affaires de jardinage pour aller les ranger dans le cabanon avec soin. Plus aucun mot ne sortirait de sa bouche en sa présence désormais. Plus aucun. Et il ne voulait plus l'entendre non plus. Finalement, il avait toujours eu raison. Depuis le début. Le silence était son allié. Il ne voulait plus entendre, plus voir, rien. Il voulait s'enfermer dans le noir et souffrir. Culpabiliser pour la peine qu'il faisait à Iseult. Et donner raison à sa mère.


Iseult, ne pleure plus.
Je m'en vais t'aimer plus loin puisque c'est arrivé.
Et avec ou sans toi, mon cœur pleure.
Inconsolable.
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